Les universités sortent enfin de la crise , Le Figaro, 19 mai 2009
Après seize semaines de conflit, les établissements les plus radicaux, comme Lille-III et la Sorbonne, ont décidé, mardi, le déblocage.
Les derniers verrous d'opposition aux réformes gouvernementales dans l'enseignement supérieur ont sauté mardi. Les universités Paris-IV, Paris-III et Lille-III ont décidé de lever les blocages, quinze semaines après le début du conflit. Seules six universités, Toulouse-II, Aix-Marseille-I, Caen, Reims et Nancy-II, sont encore bloquées.
Fer de lance du conflit, avec son président, Georges Molinié, notoirement hostile aux réformes universitaires, Paris-IV-Sorbonne aura été l'établissement perturbé le plus longtemps. Certes, les conseils de l'université et Georges Molinié appelaient depuis quelques semaines à la levée des blocages mais affirmaient aussi que «le mouvement devait se poursuivre et s'amplifier face à un gouvernement autiste».
Mardi matin, ils ont changé de ton et voté la reprise des cours «pour ne pas pénaliser les étudiants». Cette décision a certainement influencé l'assemblée générale des enseignants et des étudiants, qui, dans l'après-midi, appelaient à la levée des blocages. La lassitude des enseignants, reconnaît Valérie Robert, maître de conférences et membre de Sauvons l'Université, a joué contre le mouvement. Ces derniers étaient de moins en moins nombreux à défiler dans les rues. Le calendrier a également eu raison de la protestation. À l'approche des dates d'examens, les blocages sont devenus impopulaires, même auprès d'étudiants hostiles aux réformes.
«Le blocage et l'absence de cours depuis plus de trois mois nuisent gravement à l'avenir des étudiants les moins favorisés, et portent préjudice à notre université», explique ainsi Jacques, enseignant à Paris-IV, «gréviste et manifestant dès le début du mouvement», qui a signé ces jours-ci, comme de nombreux collègues, une pétition pour la levée des blocages.
Certains grévistes ont également estimé avoir eu gain de cause sur quelques points. La modification de leur statut a été moins importante que prévu. Le gouvernement a par ailleurs promis qu'aucun emploi ne serait supprimé à l'université l'an prochain.
Enfin, «certains présidents d'université voyaient planer la menace de ne pas voir valider l'année universitaire au-dessous d'un certain nombre d'heures de rattrapage», affirme Valérie Robert, qui estime que cette menace du ministère a pu jouer en faveur d'une reprise des cours, notamment à Paris-IV.
Mesures en faveur des boursiers
La levée des blocages intervient par ailleurs au lendemain d'une réunion entre les syndicats étudiants et la ministre, Valérie Pécresse, qui a donné des «garanties» concernant les conditions de passage des examens et la situation des étudiants dont les cours ont été perturbés par des blocages. Elle a notamment promis un mois de bourse supplémentaire pour les boursiers contraints à des examens en juillet ou septembre. Aucun ne sera privé de bourse en 2010 pour des raisons liées à son assiduité lors du deuxième semestre.
Ces mesures ont été saluées par l'Unef, premier syndicat étudiant, même s'il a souligné qu'elles ne «levaient pas les inquiétudes qui s'expriment sur le fond» du conflit. Ces garanties ont certainement apaisé les craintes de certains étudiants qui ont pris part au mouvement, parfois de façon très active. Mardi, en marge d'un déplacement, Nicolas Sarkozy affirmait qu'en bloquant les universités, on «prive les étudiants d'avenir». Il a plusieurs fois affirmé qu'il ne reviendrait pas sur les réformes. Les grévistes ne s'avouent pas pour autant vaincus. Si les examens auront lieu à Paris-III, autre bastion de la contestation avec Paris-IV, les contestataires promettent que le mouvement reprendra «après les examens» et «au retour des vacances d'été». Une affirmation qui paraît aujourd'hui prématurée, alors que les acteurs du conflit s'avouent eux-mêmes épuisés après quatre mois de bras de fer avec le gouvernement.