mardi 16 juin 2009

CNRS: Valérie Pécresse promet des moyens pour "accompagner" la réforme

CNRS: Valérie Pécresse promet des moyens pour "accompagner" la réforme, AFP, 16 juin 2009

PARIS (AFP) - La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, a promis des moyens pour "accompagner" la réforme du CNRS, dans un discours devant le Conseil scientifique de l'organisme rendu public mardi par le ministère.

Mme Pécresse, qui disposera en 2010 de 1,8 milliard d'euros supplémentaires, dont 800 millions pour la recherche, conformément aux engagements pris par l'Elysée, promet que des moyens "viendront accompagner la réorganisation en instituts", dans un discours lors d'une visite surprise au Conseil scientifique lundi soir.

Cette instance indépendante doit donner son avis sur le Contrat d'objectif et de moyen du CNRS avec l'Etat (2009-2013).

"Pour 2010, il est encore trop tôt pour vous donner des chiffres, mais je suis prête à prendre, dans le cadre du contrat d'objectifs, des engagements sur les moyens nouveaux qui seront attribués au CNRS dés 2010", a souligné la ministre. "Je vous rappelle que l'emploi sera maintenu en 2010 comme en 2011, au CNRS comme dans tous les organismes de recherche", a insisté la ministre.

Pour 2009, le CNRS a "la possibilité d'avoir 390 recrutements + 90 chaires, soit 480 nouveaux chercheurs dans vos laboratoires dés cette année", si les chaires sont pourvues, a-t-elle indiqué.

Parallèlement, Mme Pécresse a réaffirmé comme un "pilier" de la réforme l'"évaluation externe et indépendante" des établissements, unités de recherche et personnels, contestée par de nombreux chercheurs.

"Je suis prête à ce que des discussions s'engagent avec l'AERES (Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, ndlr) pour améliorer encore ses méthodes d'évaluation, mais le principe d'une évaluation externe sur la base de critères incontestables doit être conforté", a-t-elle dit.

La ministre a défendu la réorganisation --contestée-- du CNRS en 10 grands instituts, dont le dernier (sciences et technologie de l'information) "fait débat", a-t-elle reconnu, mais "j'y suis très attachée".

vendredi 12 juin 2009

Axel Kahn, un surdoué à l’université

Axel Kahn, un surdoué à l’université, La Croix, 22 mai 2009 (Lien)

Le généticien, devenu président de l’université Paris V René-Descartes, a pris une dimension intellectuelle qui excède largement le seul domaine des sciences

Mais qu’est-ce qui fait courir Axel Kahn ? On l’avait quitté il y a deux ans directeur de l’Institut Cochin – un site prestigieux dédié à la pathologie humaine, gigantesque laboratoire de 600 personnes –, président d’une toute nouvelle Fondation du handicap, membre d’un tas d’institutions savantes, écrivain impénitent (au rythme moyen d’un livre par an), assidu des plateaux de télévision et autres rencontres avec la presse. On le retrouve avec toutes ces casquettes (sauf l’Institut Cochin), plus celle de président de l’université Paris V René- Descartes, « la quatrième du pays par la taille, 35 000 étudiants, 5 000 membres du personnel », détaille le scientifique, toujours précis. Un fauteuil qu’il occupe depuis décembre 2007 à sa façon, c’est-à-dire… plus qu’à plein-temps.

« Je n’ai jamais autant travaillé de ma vie, constate-t-il avec satisfaction, calé derrière son bureau, au cœur du Quartier latin, entre tableaux de maîtres, boiseries et moulures anciennes. Je me lève tous les jours à 4 h 30, je suis ici à 6 h 30, je n’en pars jamais avant 21 heures. J’ai un chauffeur, une cuisinière, on me prépare un plateau-repas, tout est fait pour que ma journée de 15 heures se déroule sans aucun temps mort. Je ne me savais pas capable d’affronter cela. »

Pourquoi charger autant la barque, comme s’il avait encore quelque chose à prouver ? Parce qu’Axel Kahn ne sait rien faire à moitié. « S’il est à mes yeux une manière d’être immorale, confie-t-il, c’est celle qui consiste à gaspiller ses talents, à ne pas les faire fructifier. Quand je m’engage dans une tâche, j’ai à cœur de le faire au niveau maximum dont je suis capable. » Tout l’homme est là, dans l’assurance d’être parmi les meilleurs – ce que personne ne lui conteste – et dans l’orgueil d’en renouveler chaque jour la démonstration.
"J’avais une foi profonde. Je voulais être prêtre"

Chacun de ses engagements successifs, Axel Kahn les a ainsi vécus pleinement. Engagement religieux d’abord. Enfant, ce fils d’une catholique pratiquante et d’un philosophe humaniste, fervent croyant, fait siens les préceptes de l’Église et accomplit toutes les étapes du parcours du croyant : baptême, catéchisme, communions, promesse scoute sur le chemin de croix de Lourdes, enfant de chœur… « J’avais une foi profonde. J’étais très pratiquant. Je voulais être prêtre. » Mais un changement de liturgie va avoir raison de cette belle résolution. Axel a 15 ans quand la messe passe du latin au français. « Je me suis aperçu que je ne croyais pas un mot de ce que j’ânonnais jusqu’alors sans comprendre… J’en ai conclu que j’avais perdu la foi. »

S’il ne croit plus, l’adolescent n’en reste pas moins profondément attaché aux valeurs chrétiennes. Mais comment faire vivre et penser l’humanisme en dehors de la référence religieuse ? Regardant autour de lui, Axel se rend compte que d’autres personnes se battent contre les injustices et pour aider les plus faibles : les communistes. Avec la même ardeur qu’il avait mise à servir l’Église, le jeune homme rejoint les rangs de la gauche communiste. Et refait un parcours initiatique, en politique cette fois.

Là encore, il s’investit à fond, avec en un premier temps une phase de grand militantisme dans une cellule des usines Citroën. « Là, moi le fils d’une famille bourgeoise et intellectuelle, j’ai découvert un monde que je ne connaissais pas. » Un monde fait de fraternité – « j’ai beaucoup aimé les camarades communistes » – et de discours enflammés, avec effets de manche et joutes oratoires. C’est là qu’Axel Kahn va expérimenter son talent naissant d’orateur et découvrir le goût de convaincre un auditoire.

Puis arrive 1968 et l’invasion de la Tchécoslovaquie. De même que la fin de la messe en latin avait arrêté son élan religieux, cet événement porte un coup fatal au militantisme de l’étudiant. Axel Kahn va rester au Parti, mais uniquement « sur une base sentimentale ».
« Sois raisonnable et humain. »

Quand quelques années après, Georges Marchais se mettra à pilonner ses alliés socialistes du Programme commun, il rendra sa carte. On est en 1977. L’intermède « politique », ouvert seize ans plus tôt, se referme.

Axel Kahn a passé la trentaine. Le généticien, qui dirige déjà une équipe de chercheurs, a fort à faire. Et si « l’humanisme moral » lui tient toujours lieu de ligne de conduite, c’est, dit-il, avec un autre « ressort » : le suicide de son père, en avril 1970. Ce jour-là, ce philosophe brillant, admiré de sa famille, lui a laissé une lettre. Pourquoi à lui ? « Tu es de mes trois fils celui le plus à même de faire durement les choses nécessaires », écrit le père. Et de terminer par cette injonction : « Sois raisonnable et humain. » « Depuis ce jour, je n’ai cessé d’être obnubilé par cette phrase, de me demander ce qu’elle voulait dire, raconte le généticien. Je ne pouvais ignorer que la génétique avait contribué à l’eugénisme, au nazisme… Donc si je voulais être un généticien de talent, il me fallait protéger ma science contre les brigands de l’idéologie anti-humaniste. »

Après la religion, puis la politique, Axel Kahn va donc se tourner vers l’éthique. Avec le succès que l’on sait. Le scientifique s’affirme comme l’un des plus brillants esprits de son temps, de ceux qui sont capables d’argumenter au débotté en croisant références philosophiques, anthropologiques et autres. Sa capacité de séduction fait le reste. S’interroge-t-on sur la recherche sur l’embryon, les théories racistes ou le clonage, c’est lui qu’on va chercher.

Ce brio lui vaut d’être élu à 40 ans correspondant de l’Académie des sciences, la porte d’entrée pour être titulaire. Mais le désir d’Axel Kahn d’affirmer haut et fort ses convictions, allié à un côté bravache, va lui coûter le poste d’académicien. « En 2002, on m’avait demandé de créer une sorte de comité de réflexion éthique au sein de l’Académie. Quand j’ai vu que celui-ci penchait en faveur du clonage thérapeutique, j’en ai démissionné. Quelque temps plus tard, les deux Académies se sont effectivement prononcées en ce sens. Interviewé ce jour-là par divers médias, je n’ai pas pu m’empêcher de dire pourquoi je n’étais pas d’accord. Cela a eu beaucoup d’écho… Je savais que faisant cela, j’abandonnais toute chance d’être élu. Mais j’étais indigné de voir des scientifiques mettre en avant de prétendues potentialités thérapeutiques pour obtenir ce qu’ils voulaient. Entre le déplaisir de griller mes chances et celui que m’aurait procuré le fait de ne rien dire, alors que je bouillais d’indignation, j’ai eu vite fait mon choix. »
Axel Kahn est régulièrement critiqué par ses pairs

Dans la communauté scientifique, on n’apprécie guère ces façons de cavalier seul. Chouchou des médias, Axel Kahn est régulièrement critiqué par ses pairs, à qui la seule évocation de son nom fait parfois lever les yeux au ciel. En est-il affecté ? Il n’en laisse en tout cas rien paraître, disséquant avec son habituel esprit d’analyse, et en termes toujours choisis, les raisons de ce désamour : « Les scientifiques ne sont pas très bien payés. Ils veulent la reconnaissance, c’est leur récompense. Tout ce qui amène cette reconnaissance par un autre biais que la réussite scientifique leur est suspect. Ils ont un rejet de principe envers les chercheurs trop médiatisés. La raison fondamentale de leur attitude s’explique par mon influence. »

C’est plus fort que lui : l’homme ne peut pas s’empêcher de remettre les pendules à l’heure. À son heure. Comme lorsque récemment, Nicolas Sarkozy croit pouvoir se prévaloir de son avis « favorable » à la réforme de l’université. Aussi sec, le président de Paris V René-Descartes rectifie : oui, je suis pour l’autonomie, mais non, je ne suis pas d’accord avec la façon dont le gouvernement s’y est pris, fait-il savoir en substance. Lui arrive-t-il parfois d’être gagné par le doute ? « Non, je ne pense pas avoir toujours raison, se défend-t-il. Je suis intellectuel et raisonneur : je pousse les arguments jusqu’au bout. Mais on m’a déjà fait changer d’avis. » Dont acte.

On le sait moins, mais ce grand cérébral nerveux et à fleur de peau est aussi… un grand sentimental. Ce père de trois enfants aime les femmes, et ne s’en cache pas, reprenant volontiers la formule célèbre : « Je suis fidèle à chaque femme successivement. » Et c’est en termes très forts qu’il évoque son frère cadet Olivier, décédé en 1999. Son autre frère est le journaliste récemment entré en politique (MoDem) Jean-François Kahn. « J’étais uni à ce frère Olivier à la fois par une rivalité et un amour profond. On existait l’un par rapport à l’autre. Après sa mort, je me suis retrouvé comme une grandeur – au sens mathématique du terme – sans mesure, car il était la mesure de moi-même. Mais mon frère est immortel, car il vit en moi. »

Marianne GOMEZ

Axel Kahn partisan d'une sélection à l'entrée des universités

Axel Kahn partisan d'une sélection à l'entrée des universités, La Croix, 9 juin 2009 Lien

Le généticien Axel Kahn, président de l’université Paris V, est favorable à une sélection à l’entrée de l’université si l’on propose une alternative aux candidats malheureux. Entretien


Une sélection à l’entrée de l’université permettrait-elle de redonner de son prestige à l’université ?

Axel Kahn : La sélection serait en effet une solution, mais à condition de la mettre en place dans un cadre aménagé au niveau national et de proposer une alternative à ceux qui n’auraient pas été retenus. Dans mon université, la moitié des étudiants sont inscrits dans des filières sélectives, comme la médecine, la pharmacie et la chirurgie dentaire. Environ 40% d’entre eux ont obtenu un bac S avec mention très bien, 30% sortent de cette même série avec la mention bien.

Dans le reste des filières, on trouve surtout des bacheliers issus des autres séries et qui généralement présentent des mentions passable ou assez bien. Ces résultats ne leur auraient pas permis de rejoindre des filières sélectives, écoles ou IUT. Et la fac, parfois choisie par défaut, est la seule possibilité qui s’offre à eux s’ils souhaitent entamer des études supérieures. Instaurer la sélection dans certaines universités, si d’aventure la loi l’autorisait, reviendrait à renvoyer ces jeunes vers d’autres universités non sélectives et à les placer dans une situation encore plus délicate.
Quelle solution globale proposez-vous ?

Il s’agirait d’instituer, en corollaire de la sélection à l’entrée de l’université, des filières parallèles non sélectives basées sur le modèle du "collège" anglo-saxon, pour mieux prendre en compte les origines socioculturelles des étudiants. On y dispenserait, par petits groupes, avec un encadrement important et le renfort de professeurs du secondaire, un enseignement professionnalisant, qui permettrait aussi de faire émerger les personnes à même de poursuivre des études à l’université.
Comment rassurer les jeunes qui, après le baccalauréat, s’apprêtent à rejoindre l’université ?

Il faut leur dire que l’université, lieu de l’impertinence intellectuelle et de l’apprentissage citoyen, possède un atout non égalé dans le domaine de la recherche, qui nourrit les enseignements. Mais je voudrais aussi rappeler aux universitaires que ce message-là n’est pas audible lorsque, après des semaines sans cours, on doit bricoler des examens à la dernière minute. Ne soyez pas masochistes ! Les jeunes et leurs parents qui travaillent pour financer les études veulent un diplôme qui ait une valeur sur le marché de l’emploi.
Recueilli par Denis PEIRON

vendredi 5 juin 2009

Allocution de Nicolas Sarkozy devant les laboratoires internationaux de recherche thérapeutique

Allocution de Nicolas Sarkozy devant les laboratoires internationaux de recherche thérapeutique, Élysée, 5 juin 2009

Allocution devant les laboratoires internationaux de recherche thérapeutique

jeudi 4 juin 2009

A propos de l'Alliance

Communiqué des syndicats SNTRS CGT, SGEN CFDT Recherche EPST, SNCS FSU de l’INSERM sur l' « Alliance Nationale pour les Sciences de la Vie et de la Santé » avant la prochaine réunion du Conseil d’Administration de l’INSERM du 4 juin 2009.

L’annonce le 8 avril 2009 de la création de l’ « Alliance pour les Sciences de la Santé », signée entre les huit membres fondateurs (INSERM, CNRS, IRD, INRA, INRIA, CEA, Institut Pasteur et CPU) n’a donné lieu à aucune concertation au sein de ces établissements.

Sur le fond :

- Chercher à mieux coordonner les recherches effectuées en biologie et en santé par les différents opérateurs de recherche que sont les organismes de recherche et les établissements d’enseignement supérieur n’est pas a priori absurde. Le problème majeur posé par la mise en place de cette « Alliance » réside dans le fait que cette nouvelle structure n’est pas seulement une instance de concertation, mais une nouvelle structure de pilotage ayant pour mission l’analyse stratégique et la programmation scientifique dans le domaine des Sciences de la Vie et de la Santé, deux fonctions qui échapperont dorénavant aux Conseils Scientifiques des établissements dans lesquels siègent des représentants élus par la communauté scientifique.

- Cette « Alliance » est par ailleurs dotée d’un « Conseil de Coordination des Recherches en Sciences de la Vie et de la Santé » composé uniquement de représentants des directions, là encore sans participation de représentants élus de la communauté scientifique. Ce conseil est non seulement chargé de la coordination opérationnelle des différents opérateurs, mais aussi des créations d’unités, des fléchages de postes, des opérations d’investissement ou de valorisation, dépossédant ainsi les organismes et les universités de leurs responsabilités.

- Cette convention prévoit aussi le découpage des Sciences de la Vie et de la Santé en dix Instituts thématiques Multi Organismes (ITMO), chacun constitué à partir des huit instituts thématiques de l’INSERM, de l’Institut National des Sciences Biologiques du CNRS et d’entités issues du CEA ou de l’INRA. Voilà qui d’une part ne va pas simplifier le paysage de la recherche française, mais surtout ne va pas non plus faciliter pour les divers domaines des sciences de la vie leurs interfaces avec d’autres secteurs (chimie, végétal, évolution, société…), qui sont pourtant tout aussi pertinentes et nécessaires que celles avec la santé !

La mise en place de cette « Alliance » correspond à la première étape vers la création d’un « Institut National des Sciences du Vivant », proposé dans les rapports Zehrouni (AERES) et Godet, placé sous le contrôle étroit du pouvoir politique, comme vient de le confirmer le Président de la République le 11 mai 2009 : « les organismes de recherche, aujourd'hui rassemblés dans l'Alliance des sciences de la vie et de la santé, ont davantage vocation, eux, à être des agences de moyens chargées de nourrir la réflexion programmatique de l'ANR ».

Voilà pourquoi les syndicats SNTRS CGT, SGEN CFDT Recherche EPST et SNCS FSU de l’INSERM s’opposent à ce que le pouvoir présente comme « l’ Alliance Nationale pour les Sciences de la Vie et de la Santé ». C’est dans ce cadre qu’ils ont voté contre le projet de création de deux nouveaux instituts lors de la réunion du CTPC de l’Inserm du 25 mai 2009.



Villejuif, le 28 mai 2009