mardi 8 juin 2010

Valérie Pécresse veut noter les universités et les grandes écoles sur leur "performance sociale"

Le Monde, 8 juin 2010

Le gouvernement ajoute une nouvelle brique à la politique qu'il mène en faveur de l'ouverture sociale de l'enseignement supérieur. Mardi 8 juin 2010, Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur, a annoncé la création prochaine d'un "indicateur de performance sociale" qui permettra, dès 2011, de mesurer l'effort que réalisent les universités et les grandes écoles d'ingénieurs ou de management dans ce domaine.

Pour les universités, l'enjeu n'est pas tant d'accueillir davantage d'étudiants boursiers ou issus de milieux modestes que de les aider à réussir leurs études et à poursuivre celles-ci jusqu'en master au moins. Quant aux grandes écoles, elles doivent encore accroître la part de ces jeunes parmi leurs effectifs.

Certes, a souligné la ministre, "la proportion de boursiers dans les écoles d'ingénieurs a augmenté de 59 % entre 2007 et 2009 et les boursiers représentent désormais 23 % des admis en 1re année", mais l'objectif est de 30 %, "y compris dans les écoles les plus prestigieuses : tout le défi est là".

Faisant cette annonce lors d'une visite sur le campus de l'Ecole centrale de Paris (ECP), à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine), Mme Pécresse a félicité l'ECP, "temple de l'excellence", pour sa politique en matière d'ouverture sociale. La part de boursiers est en effet passée de 11 % en 2007 à 17 % en 2009.

Pour le gouvernement, ces indicateurs doivent permettre d'évaluer ce qui est fait en matière d'égalité des chances depuis quelques années, mais également de "récompenser" les établissements vertueux. L'évaluation de chaque université ou chaque école sera publique. Surtout, elle sera prise en compte dans l'attribution des moyens ou des subventions aux établissements du supérieur.

Reste qu'entre des universités publiques et des écoles, dont beaucoup sont privées, l'impact financier sera variable. L'Etat, par exemple, ne concourt pas au budget de 100 millions d'euros d'HEC. La grande école de management perçoit juste 100 000 euros de subventions pour certaines actions liées à l'ouverture sociale. Pour le budget de l'Essec, autre école prestigieuse, la part émanant de l'Etat n'est que de 2 %, soit 2 millions d'euros sur 95 millions.

"Un indicateur est un élément intéressant, note Pierre Tapie, directeur de l'Essec et président de la Conférence des grandes écoles, mais ce ne peut être qu'un élément parmi d'autres." Mme Pécresse a annoncé qu'"un groupe d'experts sera réuni pour définir les critères" des indicateurs. Ceux-ci devraient prendre en compte l'accueil et la réussite des étudiants boursiers, l'efficacité des actions menées, l'accompagnement social mis en place (l'attribution de bourses, notamment), le recours à l'apprentissage, etc.

Benoît Floc'h

La Cour des comptes critique la politique de regroupement des universités

Le Monde, 8 juin 2010

La politique de regroupement universitaire en cours et son pilotage par l'Etat ont été critiqués mardi 8 juin 2010 par la Cour des comptes.

"Le moment est peut-être venu de s'assurer que, dans ce paysage très évolutif, avec une succession d'annonces, la ligne stratégique du gouvernement est bien claire", a déclaré le président de la troisième chambre de la Cour des comptes, Jean Picq, devant la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Valérie Pécresse, et des députés de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Depuis 2006, plusieurs initiatives de regroupements des universités et des organismes de recherche ont été adoptées par les gouvernements successifs, dont les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES), l'Opération campus et le grand emprunt, sans compter l'autonomie de gestion des universités.

S'interrogeant sur "l'impact encore faible" des PRES "en matière de formation et de recherche", la Cour des comptes, par la voix de M. Picq, a fait plusieurs recommandations au gouvernement pour y remédier.

"Une mise en cohérence des diverses initiatives législatives et financières majeures qui se sont succédé depuis quatre ans est indispensable pour savoir où l'on va", a déclaré M. Picq, demandant notamment "quel est le rôle des PRES dans la mise en œuvre du grand emprunt ?"

"TOUT ÇA EST EXTRÊMEMENT COHÉRENT"

Ensuite la Cour a prôné de "donner plus de pouvoir aux PRES" mais aussi de "renforcer le pilotage stratégique de l'Etat" notamment via des contrats d'objectifs signés avec les PRES, alors que ces contrats sont signés aujourd'hui avec chacune des universités membres des PRES.

En réponse, la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a assuré que "les PRES doivent être efficaces", jugeant qu'il fallait "aller plus loin" dans "la coordination de l'offre de formation", au niveau des doctorats et des masters surtout.

Elle a ajouté que la contractualisation avec les PRES était possible, mais pas en doublon avec celles des universités et qu'il appartenait aux différents membres d'un PRES, dans le cadre de leur autonomie, de dire s'ils souhaitaient que "la structure porteuse" du contrat soit le PRES.

Concernant le grand emprunt, Mme Pécresse a assuré que "le PRES sera choisi comme porteur du grand emprunt dans un très grand nombre de sites, mais il n'est pas impossible que le grand emprunt fasse apparaître la faiblesse intrinsèque de certains PRES".

Interrogé par plusieurs députés sur la "cohérence" et la "lisibilité" de la politique de regroupements en cours, la ministre a répondu que "tout ça est extrêmement cohérent".

jeudi 3 juin 2010

Un nouveau Quartier latin va naître sur les friches industrielles du nord de Paris

Le Monde, 3 juin 2010

Il faudra attendre encore quelques années les bâtiments, mais une conférence sur le "campus dans la ville", à Aubervilliers, jeudi 3 juin 2010, doit donner un coup d'envoi symbolique du projet de "campus Condorcet".

D'ici à 2016, c'est un nouveau quartier universitaire qui doit émerger des friches industrielles et ferroviaires du nord de Paris.

Lauréat en 2009 du Plan Campus (450 millions d'euros de dotation de l'Etat en capital), Campus Condorcet, initié par la région Ile-de-France, doit rassembler à terme sur près de 200 000 mètres carrés pas moins de 15 500 chercheurs, étudiants et doctorants...

Grâce à ce Plan Campus et aux collectivités territoriales (Paris et Aubervilliers, département de Seine-Saint-Denis et région Ile-de-France), devraient progressivement sortir de terre dans les prochaines années une bibliothèque, un centre de conférences, des centres de recherche, des amphis, des logements, des lieux de vie.

Bref, les responsables politiques espèrent reproduire l'expérience réussie du quartier-campus de l'université Paris-VII, à Paris-Rive gauche, dans le Sud-Est parisien.

LA CRÈME DE LA RECHERCHE

De part et d'autre du périphérique parisien, entre la porte de la Chapelle, au sud, et Aubervilliers, au nord, ce nouveau haut lieu des sciences humaines et sociales doit attirer à terme la crème de la recherche en sciences humaines et sociales.

Après de nombreux débats, notamment à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) en 2007, huit établissements ont accepté de relocaliser une partie de leur recherche ou de leur enseignement.

A côté de l'EHESS, les universités Paris-I - Panthéon-Sorbonne, Paris-VIII - Saint-Denis et Paris-XIII - Villetaneuse devraient se retrouver l'Ecole pratique des hautes études (EPHE), l'Ecole des chartes, le Centre national de la recherche scientifique et l'Institut national d'études démographiques (INED).

UNE AUTRE HYPOTHÈSE

Si l'ensemble des établissements se retrouvera à Aubervilliers, seule l'université Paris-I doit pour l'instant occuper le site de la Chapelle. Cependant, les choses pourraient encore bouger. D'importantes discussions ont lieu actuellement pour envisager une autre hypothèse.

L'université Paris-I pourrait finalement rejoindre le site principal d'Aubervilliers, tandis que Paris-XIII installerait à la Chapelle son IUT de Villetaneuse dans la place laissée vacante.

Si beaucoup d'acteurs du dossier estiment qu'il est encore trop tôt pour annoncer cet échange, "il s'agit bien d'une hypothèse étudiée très sérieusement", explique Jean-Loup Salzmann, président de l'université de Villetaneuse.

Pour Paris-XIII, l'intérêt est triple : s'installer dans la capitale, étendre son bassin de recrutement d'étudiants et offrir de meilleures conditions de travail.

Pour Paris, doter la ville d'un second IUT est tentant, et permettra de diversifier l'offre de formation universitaire dans le nord de la capitale.

Pour passer de l'hypothèse à la réalité, le chemin reste tout de même long. Les collectivités territoriales (notamment la ville et la région, qui s'étaient engagées à financer l'installation de Paris-I) et l'Etat doivent en effet se mettre d'accord et amender le contrat de projet Etat-région. Un processus qui risque de prendre du temps.

Philippe Jacqué