lundi 28 octobre 2013

Un plan et un statut pour encourager les étudiants à devenir entrepreneurs


Le Monde, 23.10.13 
 
Les étudiants et jeunes diplômés qui créent leur société pourront conserver leurs droits sociaux et bénéficier de formations, annonce la ministre de l'enseignement supérieur, Geneviève Fioraso
 
Entre l'entreprise et les études, à un moment il a fallu choisir. « Ça a été vite vu. » Christophe Menez, 23 ans, a choisi son entreprise. « Avec mes associés, nous l'avons créée en mars 2012, pendant nos études, raconte-t-il. Très vite, il est devenu compliqué de gérer les deux. Comme mes copains me donnaient les cours, cela restait faisable. Mais à la rentrée, cette année, je n'ai pas pu suivre. Mon agenda professionnel est plein, et je n'ai plus le temps de faire autre chose. »
  
Le jeune Brestois réserve donc dorénavant toute sa « fougue » à l'aventure entrepreneuriale à laquelle il se consacre depuis un an et demi. « Parce que c'est passionnant et que c'est le moment !, s'enthousiasme-t-il. On voit le train qui part : que faire ? On a tous sauté dedans ! » Sa société Zéro-Gâchis permet aux consommateurs de dépenser moins en achetant des produits en voie de péremption et aux enseignes de la grande distribution d'éviter le gaspillage alimentaire en écoulant ces denrées à prix bradé. Parmi les trois associés de M. Menez, il y a son frère Paul-Adrien, qui, lui aussi, a abandonné ses études. Sueurs froides pour les parents... « Ils sont fiers de ce que l'on fait, assure Christophe Menez, mais ils sont aussi inquiets. Parce que, si ça ne marche pas, on se retrouvera en plus sans diplôme... »

Créer son entreprise revient parfois à jouer à la roulette. Pour un étudiant, cela relève de la roulette russe. Le gouvernement, qui souhaite atteindre « 20 000 créations ou reprises d'entreprises en quatre ans par des jeunes issus de l'enseignement supérieur », entend bien sécuriser autant que possible l'audace de ces patrons précoces.

Lors d'une visite à l'incubateur de l'université de Marne-la-Vallée, mardi 22 octobre, la ministre de l'enseignement supérieur, Geneviève Fioraso, devait présenter un plan en faveur de l'entrepreneuriat étudiant. L'idée est de mieux former et accompagner ces jeunes dans leur projet, de leur accorder un statut d'« étudiant-entrepreneur » leur permettant de conserver leurs droits sociaux et d'apporter un soutien financier aux idées les plus novatrices. La création de ce statut avait été annoncée par François Hollande, en avril 2012, lors des Assises de l'entrepreneuriat.

« Un statut ? Oui, ça nous a manqué, explique M. Menez. J'aurais préféré ne pas arrêter mon master à France business school. Et financièrement, c'est très dur. On galère depuis un an. »

Alexandre Dana, 24 ans, est toujours étudiant. Avec deux amis, il a créé Hellomentor, une entreprise de soutien scolaire et de cours en ligne qui se distingue des grands concurrents par la souplesse d'organisation des cours. Pour M. Dana, il n'est pas sûr que le prolongement de sa condition d'étudiant soit indispensable. « Le statut étudiant, c'est le statut «t'es fauché», constate-t-il. 98 % des entrepreneurs touchent les indemnités chômage. Nous, comme étudiants, n'avons droit qu'à une réduction au ciné ! »

Cependant, le jeune entrepreneur reconnaît qu'un meilleur accompagnement ne sera pas du luxe. « L'incubateur de notre école, l'ESCP Europe, nous a apporté un soutien moral, ce qui est très important au début, explique-t-il. Mais, en termes de contenus académiques, on n'entre pas dans les détails. Nous souffrions d'un manque de connaissances sur les aspects administratifs de la vie d'une boîte. »

C'est ce qu'avait constaté Mme Fioraso, lorsqu'elle présidait le pôle d'innovation Minatec à Grenoble.  
« Les jeunes qui venaient me présenter des projets d'entreprise, dit-elle, maîtrisaient l'aspect scientifique et technique, mais ils manquaient de formation pour la gestion, le marketing, etc. » D'où l'utilité, à ses yeux, de renforcer la formation à l'entrepreneuriat.

Tanguy Bard de Coutance est demandeur. Etudiant en master marketing et vente à l'université Jean-Moulin Lyon-III, il a créé en juillet 2012, avec deux amis, une entreprise qui propose des supports publicitaires d'un nouveau genre. L'idée : pulvériser de l'eau à haute pression sur des pochoirs posés au sol pour obtenir un message publicitaire éphémère et écolo. Pour le jeune homme, la poursuite de ses études représente « un gros avantage, celui de la rapidité ». « Cela nous permet notamment de demander conseil aux professeurs, estime-t-il, et donc d'aller deux fois plus vite qu'un autodidacte. »

Quant au statut spécifique, ajoute-t-il, il peut permettre de « légitimer certaines choses, notamment vis-à-vis des professeurs qui ne comprennent pas ce qu'on fabrique, ou le temps que cela nous prend de mener notre projet ».

Pour un étudiant-entrepreneur, être crédible est un enjeu de taille. Lorsqu'il a rencontré sa banquière pour obtenir un soutien financier, M. Dana est tombé de haut : « Elle ne m'a pas cru ! Elle pensait que j'étais envoyé par une compagnie... »

Et si son entreprise, a pu lever 200 000 euros, ce n'est pas grâce à elle, mais à des investisseurs privés... « Des étudiants qui lèvent des fonds et vont faire signer des pactes d'actionnaire de 700 pages entre deux amphis, c'est rare », concède le jeune homme. Sans rancune.

L'incrédulité des banques, il est vrai, n'est rien à côté de celle des parents. « Ils sont inquiets, constate M. Dana. Seul un article de presse peut les rassurer ! Dès lors, on ne subit plus aux repas de famille les questions du type : «Pourquoi tu ne prends pas un vrai boulot ?» » Ça, c'est fait.

Benoît Floc'h
 

mercredi 16 octobre 2013

Derrière le MOOC à la française : Google

Le Monde.fr | Par 
La nouvelle ne fera pas rire tout le monde. La plateforme de cours en ligne grand public récemment lancée par le gouvernement français s'appuie sur la technologie d'edX, l'attelage des prestigieuses universités américaines Harvard et du Massachussets Institute of Technology... soutenu allégrement par Google.

"C'est la première fois qu'un ministre de l'éducation s'engage pour l'enseignement en ligne (...). L'adoption par la France de notre plateforme est la preuve du potentiel de notre solution", se félicitait le patron d'edX, Anant Agarwal, dans un communiqué passé inaperçu le 3 octobre 2013, au lendemain de l'annonce de la création de "FUN", l'acronyme pour "France université numérique", par Geneviève Fioraso, la ministre de l'éducation et de l'enseignement supérieur.


Le MOOC (pour "massive open online course") à la française se construit donc sur des fondations américaines. FUN doit donner ses premiers cours virtuels en janvier 2014. Il sera possible de s'inscrire à partir du 28 octobre 2013. Le site est encore à l'état de vitrine.

Pour l'instant, la plateforme repose sur la technologie openedX, portée par Google. Les données sont hébergées par l'Inria, une activité que l'institut de recherche spécialisé en informatique découvre pour l'occasion. 

Une poignée de développeurs est chargée d'adapter la platforme edX à la sauce française, en changeant les logos et en remplaçant YouTube par Dailymotion. Enfin, c'est Capgemini – un grand groupe français de services informatiques – qui détient la responsabilité de coordonner ce petit monde.

"PIED DE NEZ AU 'MADE IN FRANCE'"

L'énoncé des acteurs de FUN n'a pas manqué de faire réagir vivement le Landerneau numérique français. "Nos start-up font face à un mur au niveau de l'achat public. C'est un véritable pied de nez au 'made in France' numérique", déplore Loïc Rivière, délégué général de l'Association française des éditeurs des logiciels et solutions Internet.

"Ils voulaient aller vite, ils ont choisi l'efficacité... Depuis, nous avons eu des explications avec la ministre, qui nous a assuré qu'aucun choix définitif n'était fait, veut croire Guy Mamou-Mani, président du Syntec numérique. Si l'Etat ne soutient pas l'écosystème à cette occasion, il se décrédibilise totalement. Sur ce sujet, les Etats-Unis ne sont pas beaucoup en avance. C'est vraiment l'occasion de faire un MOOC français de haut niveau, et pas de la petite cuisine", pointe-t-il.

Au ministère, on maintient en effet que les choses ne sont pas aussi avancées. "Il n'y a encore rien d'arrêté, affirme-t-on. Nous sommes en train de choisir quelle technique nous allons adopter", en fonction de l'interopératibilité, du service et de la capacité de montée en charge du système. 

"A niveau égal, nous choisirons bien entendu une solution française. Le fait de commencer avec edX ne présage pas du reste", ajoute l'entourage de Mme Fioraso.

"LA PLATEFORME DE GOOGLE EST UNE ROLLS"

Reste qu'en janvier, au moment de la mise en ligne des premiers cours, ce seront bien les programmes de Google qui seront à la manœuvre. Ne serait-ce que pour une question de timing. 

"edX, c'est un choix pragmatique à court et long terme, explique Matthieu Cisel, doctorant à l'ENS Cachan, qui suit le sujet de très près. La plateforme de Google est une Rolls ; en France il n'y avait que des 2-CV qui roulent à peine. C'est vrai qu'il est dommage que ce soit les Américains qui le fassent, mais ils offrent sur un plateau une solution très performante".

En France, personne n'est ainsi capable de mettre en place la correction par les pairs, qui permet aux professeurs d'éviter d'avoir à corriger mille copies en une semaine, ce qui peut arriver avec une salle de classe planétaire.

A HEC, on comprend la position du ministère. "La plateforme de Google est bien faite, et surtout bien avancée. Partir de zéro dans le domaine, c'est un travail titanesque. En plus, comme c'est une solution open source [le code informatique peut être modifié par ceux qui le souhaitent], elle sera souvent améliorée", estime Vanessa Klein, la directrice de l'innovation technologique de l'école de commerce, qui vient d'ouvrir son propre MOOC avec Coursera, le concurrent américain d'edX.

Choisir Google, ou presque, au nom de l'open source ? Mathieu Nebra, cofondateur d'OpenClassrooms, une start-up parisienne spécialisée dans l'enseignement Internet, n'est pas vraiment d'accord : "En fait, nous serons complètement dépendants des développements d'edX. Nous n'aurons pas la main sur la manière de structurer les cours en ligne. Avec l'open source, on peut effectivement modifier le code, mais il faut avoir les compétences..." Lui et quelques autres acteurs du secteur ne rêvent que d'apporter leur contribution.  


lundi 7 octobre 2013

Des présidents d’université appellent ouvertement à une sélection à l’entrée

Par Marie-Christine Corbier | 06/10 | 19:00

 Les difficultés budgétaires des universités relancent la question de la sélection des étudiants en première année. Un quart des filières de licence pratiquent aujourd’hui le tirage au sort pour contenir le flot d’inscriptions.

Le débat sur la sélection à l’université refait surface. Le syndicat étudiant UNI, classé à droite, l’a relancé en dénonçant voilà quelques semaines la pratique arbitraire du tirage au sort qui serait, selon lui, en plein essor. Plusieurs présidents d’université, réputés à gauche pour certains, ont depuis embrayé, n’hésitant pas à mettre les pieds dans le plat et appelant à sortir de cette ambiguïté.
De fait, la sélection à l’université existe mais se cache derrière les bi-licences ou le tirage au sort. Cette dernière pratique «existe depuis 1997, confie la ministre de l’Enseignement supérieur, Geneviève Fioraso. Ce phénomène n’est ni en hausse, ni généralisé. Il ne concerne pas plus de 25% des filières de licence», assure-t-elle.

Le tirage au sort concerne les filières souvent saturées comme les STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives), mais aussi le droit ou les activités culturelles.
La pratique est légale. Mais elle fait grincer des dents. Et pose la question de «savoir si l’université doit accueillir tout le monde ou sélectionner», reconnaît le président de la Conférence des présidents d’université (CPU), Jean-Loup Salzmann, classé à gauche.

Un avis partagé par le président de l’université de Versailles Saint Quentin-en-Yvelines (UVSQ), Jean-Luc Vayssière : «En droit, avec 300 étudiants dans un amphi de 200, le bâtiment va exploser, prédit-il. Je ne peux pas prendre la responsabilité de mettre des étudiants dans les escaliers...»

«Nous arrivons dans le mur»

Faut-il plus de moyens pour accueillir davantage d’étudiants ? «A-t-on intérêt à augmenter le nombre de places d’accueil pour des filières aux débouchés compliqués ?», rétorque Geneviève Fioraso. La ministre plaide pour une information des lycéens en amont, afin qu’ils s’orientent en connaissance de cause.
«Au nom d’un idéal que nous partageons tous, celui de l’ouverture de l’université, nous arrivons dans le mur», juge la présidente de Montpellier 3, Anne Fraïsse, qui envisage de recourir au tirage au sort en 2014. «C’est difficile de faire pire comme sélection», regrette-t-elle, en réclamant «des étapes intermédiaires entre une sélection complète et une ouverture sans aucune surveillance.» 

«Il faut trouver un curseur entre les deux», affirme cette femme de gauche, qui se dit «frappée que, sur une université qui compte 5.000 étudiants en première année, 500 aient entre 0 et 2 de moyenne générale».

Elle souligne qu’une circulaire rappelait il y a quelques mois aux présidents d’université leur devoir d’accueillir des étudiants qui redoublent «pour la troisième, la quatrième, voire la cinquième fois sans avoir eu de résultat». 

«Pour les motifs de non-sélection, nous n’avons pas le droit de les refuser, poursuit Anne Fraïsse. Et après, on nous reproche nos mauvais résultats en première année ! Ces étudiants ont-ils leur place à l’université ? Est-on responsable des étudiants qui nous demandent une carte d’étudiant, et finalement pas grand-chose d’autre 
 
Jean-Louis Vayssière s’emporte lui aussi contre «  a sélection par l’échec en fin de première année. En anglais, trois mois après la rentrée, il ne reste que la moitié des étudiants». Il réclame des filières sélectives dès la licence, afin que l’université ne soit pas «privée de certains des meilleurs éléments».

Jean-Loup Salzmann, de son côté, insiste sur l’orientation des étudiants, qui doit être «plus prescriptive». Il faut «pouvoir presque imposer, à des gens dont on sait qu’ils n’ont aucune chance de succès, d’aller dans une filière où ils seront mieux encadrés».

Mais le président de la CPU réclame aussi des moyens supplémentaires. «Aujourd’hui, le nombre d’étudiants augmente de 2 à 4% par an, conclut-il. Si on veut passer de 43 à 50% d’une classe d’âge au niveau licence [l’objectif gouvernemental, NDLR], il faudra augmenter massivement les cursus.»

mercredi 2 octobre 2013

Selon un sondage, la France est en retard sur les cours en ligne

Le Monde.fr avec AFP | 02.10.2013

La France est en retard en matière d'accessibilité des cours universitaires sur Internet pour 65 % des étudiants et 78 % des enseignants du supérieur, selon un sondage OpinionWay pour le ministère de l'enseignement supérieur dévoilé mercredi 2 octobre.

Le sondage s'est penché notamment sur le phénomène des MOOC – "Massive Open Online Courses" ou, en français, quelque chose comme : enseignement de masse ouvert en ligne – en vogue aux Etats-Unis et émergents en France.

La ministre de l'enseignement supérieur, Geneviève Fioraso, doit présenter, mercredi, son projet "France université numérique (FUN)" qui vise "le développement de nouveaux services numériques pour les étudiants et la rénovation des pratiques pédagogiques"Selon France Info, elle devrait annoncer la création de plusieurs dizaines de MOOC sous la forme de vidéos mise en ligne pour une dizaines d'universités dès le mois d'octobre.

LES MOOC, "COMPLEXES ET CHRONOPHAGES" ?

A en croire le sondage Opinionway, seuls 5 % des étudiants et 18 % des enseignants français disent savoir exactement ce que sont les MOOC, tandis que 20 % des étudiants et 23 % des enseignants en ont entendu parler sans savoir précisément ce que c'était. Parmi les étudiants qui déclarent connaître les MOOC, 19 % en ont déjà suivi un, entièrement ou pas (19 % des profs également).

Interrogés sur les avantages potentiels, 61 % des étudiants pensent qu'ils permettent à ceux qui travaillent de suivre les cours, 59 % de faciliter les révisions, 53 % de suivre un cours n'importe où, n'importe quand, 41 % de faciliter l'accès à l'enseignement aux handicapés ou encore 25 % de renouveler la manière d'enseigner, idée partagée par 22 % des professeurs.
S'ils en avaient la possibilité dans leur établissement, 94 % des étudiants et 77 % des enseignants utiliseraient une plateforme de cours en ligne (ces derniers pour y mettre leurs cours). 

Les étudiants qui ne l'utiliseraient pas expliquent notamment qu'ils préfèrent échanger de vive voix, ou qu'ils comprennent mieux lors de cours physiques, où ils profitent des questions des autres élèves. Les profs s'inquiètent en premier pour la propriété intellectuelle et une création des MOOC "complexe et chronophage".

Le numérique va probablement ou certainement améliorer la transmission du savoir pour 88 % des étudiants, la réussite pour 82 %, l'orientation pour 74 % et l'insertion professionnelle pour 64 %.

L'université française passe de l'amphi aux cours en ligne

LE MONDE | 02.10.2013 - Par Nathalie Brafman

C'était une première. L'an dernier, une trentaine d'élèves ingénieurs de l'école Centrale Nantes et de Télécom Bretagne assistent à un cours sur l'acquisition des connaissances sur le Web. Un petit groupe. En réalité, ils sont beaucoup plus. Le cours est accessible aux internautes du monde entier : 1 300 étudiants, de Madagascar au Canada en passant par la Martinique, suivent l'exposé grâce à Internet.

A l'heure des tablettes et des smartphones, les universités françaises se lancent dans une nouvelle forme d'enseignement qui devrait révolutionner l'accès à la connaissance.
Nés aux Etats-Unis, les cours en ligne ouverts et massifs ("MOOC" en anglais ou "CLOM" en français) débarquent en France. Il s'agit de cours dispensés gratuitement sur Internet par les meilleurs établissements et mis à la disposition de toute personne qui veut apprendre à travers le monde. Aujourd'hui, n'importe quel étudiant peut s'inscrire à l'un des nombreux MOOC de Harvard, Stanford ou du MIT. Demain, ce sera de Polytechnique, de la Sorbonne... Geneviève Fioraso, la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, devait lancer, mercredi 2 octobre, France université numérique (FUN).

Un acronyme à consonance anglo-saxonne pour un enjeu national. FUN proposera une plateforme, déployée par l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria), censée permettre le développement de nouveaux services numériques pour les étudiants. En clair, le déploiement à grande échelle des MOOC dès janvier 2014.

Les études le prédisent : les cinq prochaines années verront exploser le marché mondial de l'e-éducation. L'enjeu est énorme : il s'agit non seulement de révolutionner la transmission des savoirs, mais aussi d'éviter qu'elle ne soit aux mains de quelques entités. L'objectif de ce plan université numérique : faire en sorte que chaque étudiant ait accès à des cours en ligne d'ici cinq ans et pouvoir obtenir à terme une certification et, pourquoi pas, un diplôme. C'est aussi l'un des enjeux de l'enseignement à distance.

Il était temps que la France s'y mette. Alors qu'aux Etats-Unis 80 % des établissements disposent de cours en ligne, ils sont moins de 3 % en France. Outre-Atlantique, deux plateformes, Coursera et EdX, fondées respectivement par deux professeurs d'informatique de Stanford et par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) et Harvard, ont investi 43 millions et 60 millions de dollars dans le développement des outils et des contenus. Aujourd'hui, plus de trois millions d'étudiants peuvent suivre les cours des plus prestigieuses universités : Stanford, Harvard, MIT...

En Europe, le Royaume-Uni et l'Espagne ont créé des universités totalement virtuelles. Là-bas, des étudiants sortent déjà diplômés. Dans les prochains jours, le Royaume-Uni doit par ailleurs lancer sa plateforme FutureLearn. L'Allemagne en fera autant avec Iversity.
En France, l'initiative du ministère de l'enseignement supérieur est une première. Jusqu'ici, s'il existait un réseau pour relier universités et laboratoires de recherche (Renater, créé en 1993), rien n'avait été pensé sur les contenus. Chacun était libre de développer ce qu'il souhaitait dans son coin.

"Evidemment, le numérique ne se planifie pas d'en haut, veut rassurer Mme Fioraso. Il faut laisser de la place aux initiatives, mais il faut quand même que l'on ait une vision de ce qu'est l'université numérique en France." En clair : FUN aidera à définir ce que peuvent être des cours et des validations en ligne, à les mettre en place, à mieux faire connaître les bonnes pratiques des établissements... "L'idée, c'est vraiment d'encourager les initiatives et qu'elles soient reliées sur la même plateforme", explique la ministre. Sans pour autant imposer quoi que ce soit aux universités, autonomie oblige. Pas de "Gosplan", mais une équipe vouée au service des universités.

Depuis quelques mois, un nouveau MOOC est lancé presque chaque jour. Une soixantaine ont été identifiés et vingt d'entre eux sont d'ores et déjà disponibles. Une dizaine d'établissements, des écoles – Centrale, Mines Télécom, Polytechnique –, mais aussi des universités – Bordeaux-III, Montpellier-II, Paris-X, Paris-II – développent des cours dans de nombreuses matières : histoire, mathématiques, santé, philosophie, droit...

DU MAÎTRE À L'ÉCLAIREUR

Au total, ce plan se décline en dix-huit actions, les MOOC devant servir à la fois à faciliter la mise en place d'aide à l'orientation des lycéens et des étudiants et à la réussite en premier cycle grâce à une pédagogie différente. L'enjeu ? Que les cours en amphi, s'ils ne disparaîtront pas complètement, soient de moins en moins nombreux.

Le professeur, quant à lui, devra passer d'une posture de maître, debout sur l'estrade et régnant sur le savoir, à celle d'un éclaireur aux côtés des étudiants. Accompagnement plus personnalisé, cours interactifs, tutorat en ligne... Dans le cadre de la mise en place des Ecoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE), les nouveaux professeurs devraient être formés "au" et "par" le numérique. L'une des dix-huit actions consistera d'ailleurs à reconnaître et valoriser, dans l'évolution de carrière des enseignants-chercheurs, leur investissement pour intégrer le numérique dans leurs pratiques pédagogiques. Un bouleversement énorme, sachant qu'aujourd'hui la carrière d'un enseignant-chercheur est davantage influencée par ses activités de recherche que par la reconnaissance de son activité d'enseignement.

Pour que cette modernisation soit bien ancrée dans les esprits, la loi "Fioraso", promulguée en juillet, prévoit la nomination d'un vice-président chargé des questions et des ressources numériques dans les communautés d'université. Avec FUN, le ministère espère évidemment éviter que les universités et les écoles soient dépendantes des plateformes américaines. FUN disposera d'un fonds de financement spécial à travers une fondation – 12 millions d'euros, par vagues successives, seront alloués. Si rien n'est imposé, il faudra néanmoins que chaque projet proposé soit créatif. Il s'agit d'aller au-delà du professeur qui parle derrière son micro...

Au-delà des étudiants, c'est toute la formation professionnelle qui est visée. Sur les 32 milliards d'euros, les universités ne récupèrent que 4 %. Enfin, le ministère vise évidemment tous les pays francophones. Là encore, l'enjeu est gigantesque. En sciences et en technologies, par exemple, les élites africaines envoient aujourd'hui leurs enfants dans des universités anglo-saxonnes.


mercredi 25 septembre 2013

Reinventing Our Universities in the 21st Century - Time Summit

References - Time Summit.

Is the modern university able to change? A panel, moderated by Nick Lemann, discusses the transformation of higher education in the 21st century at the 2013 TIME Summit on Higher Education.

 Read more: http://nation.time.com/2013/09/20/reinventing-our-universities-in-the-21st-century/#ixzz2fWcCgYoz

Que penser du crowfunding de la recherche?


Liens

- http://www.deuxieme-labo.fr/article/ird-crowdfunding-science/

dimanche 15 septembre 2013

Saclay invente l'université du XXIe siècle



Références

- Sur le plateau de Saclay, l'ambition de bâtir une "Silicon Valley" à la française. Le Monde, 12.09.2013


- Saclay invente l'université du XXIe siècle. Le Figaro, 11 juin 2010





Le futur campus doit accueillir 30.000 étudiants et 12.000 chercheurs d'ici à 2019.

Nicolas Sarkozy a promis d'en faire une «Silicon Valley» à la française, capable de concurrencer Cambridge ou le MIT.

Pour le moment, les bâtiments et les centres de recherche du plateau de Saclay (situé à 25 km de Paris, pour partie dans les Yvelines, pour partie dans l'Essonne), perdus au milieu des champs et très espacés les uns des autres, n'offrent guère un visage attrayant en dépit d'acteurs prestigieux comme le CEA, le CNRS ou Polytechnique.

Choyé par le gouvernement, qui rêve de transformer ces bâtiments en vitrine de la recherche française, le plateau a bénéficié d'un milliard d'euros, cette année, dans le cadre du grand emprunt, à additionner aux 860 millions d'euros attribués l'année précédente dans le cadre du plan campus.

La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, et Pierre Veltz, le délégué interministériel chargé du projet, devaient présenter hier soir les premiers plans du futur campus aux élus et associations locales, qui craignent pour certains un «bétonnage» de Saclay au détriment de l'agriculture.

Au ministère de l'Enseignement supérieur, on se veut rassurant et on promet un «campus vert, écologique et vivant». «Nous allons créer beaucoup d'espaces verts, et les zones de nouvelles constructions seront très faibles sur le plateau.»

La zone de l'École polytechnique à Palaiseau, «qui nécessite un bon quart d'heure à pied pour aller d'un bout à l'autre», devrait être densifiée et dotée de commerces et de services. Elle sera traversée par un bus, au milieu, qui reliera aussi les autres pôles en attendant le métro automatique du Grand Paris.

Le campus sera découpé en six zones différentes autour d'établissements phares existants comme HEC et l'Inra à Jouy-en-Josas.

La question des transports

L'université Paris-XI Orsay devrait quitter ses locaux vétustes, dans la vallée, et occuper de nouveaux bâtiments dans la zone du Moulon, près de Supélec, l'École centrale et l'École normale supérieure, et dans la zone de Palaiseau, qui, elle, devrait récupérer entre autres les Mines de Paris, Télécom ParisTech et l'Ensta ParisTech.

Rénovés, une partie des anciens bâtiments de l'université Paris-XI pourraient être utilisés comme logements.

D'ici à 2019, 23 institutions de recherche et d'enseignement seront donc rassemblées dans un souci de synergie et de mutualisation des installations. Aux 30.000 étudiants et 12.000 chercheurs s'ajouteront de nombreux salariés de centres de recherche privés.

La question des transports reste par ailleurs cruciale. Le métro du Grand Paris devrait desservir Saclay d'ici à 2020 mais, pour le moment, les élus locaux sont surtout partisans d'une amélioration de la desserte existante, car, aujourd'hui, se rendre dans les bâtiments éparpillés sur 9 kilomètres carrés implique de passer du temps dans les bouchons ou de patienter parfois une quinzaine de minutes pour prendre un bus dans les gares RER.

Quant aux centres de recherche, écoles et universités, ils devront favoriser des projets de recherche et d'enseignement dans l'électronique, le climat, l'informatique l'énergie, la santé, l'environnement, etc.

Pour Hervé Le Riche, chef de projet à la Fondation de coopération scientifique, chargée du volet académique du futur campus du plateau de Saclay, «l'innovation de demain naîtra de la transdisciplinarité. On ne peut pas se limiter aux sciences fondamen­tales, nous sommes très attachés à la dimension des sciences humaines et sociales».

La courroie de transmission entre la recherche et l'entreprise, affirme-t-il, c'est l'étudiant. L'objectif est de créer une centaine de start-up par an.

mardi 3 septembre 2013

La Khan Academy, l'école du futur


 Références

- La Khan Academy, l'école du futur - LE MONDE | . Par

mercredi 31 juillet 2013

Sugata Mitra

- Wikipedia: http://en.wikipedia.org/wiki/Sugata_Mitra - Build a school in the cloud: http://www.ted.com/talks/sugata_mitra_build_a_school_in_the_cloud.html - http://www.npr.org/2013/04/25/179010396/unstoppable-learning - http://www.rslnmag.fr/post/2011/7/1/sugata-mitra_et-l-experience_a-hole-in-the-wall_le-revolutionnaire-pacifiste-de-l-education.aspx - http://www.rslnmag.fr/post/2013/02/28/Sugata-Mitra-1-million-pour-creer-des-ecoles-dans-le-cloud.aspx - http://steve-wheeler.blogspot.fr/2013/06/sugata-mitra-charlatan-or-genius.html

lundi 22 juillet 2013

Selon l’Unef, 27 universités pratiquent illégalement une sélection des étudiants

lesechos.fr 22/07/13

Dans son rapport annuel sur les dérives des universités, l’Unef, premier syndicat étudiant, accuse 24 universités de persister à imposer des frais d’inscription illégaux, contre 30 l’an dernier et plus 50 en 2005.

 Le rapport annuel de l’Unef sur les dérives des universités est alarmant. Selon le premier syndicat des étudiants, 27 universités pratiquent une sélection illégale des étudiants après le bac.

« De plus en plus d’établissements choisissent de limiter le nombre de places disponibles dans leurs licences par un processus de sélection », déplore l’Unef. « Cette nouvelle tendance » est « en totale contradiction avec la loi, qui stipule que la sélection d’un bachelier pour l’accès aux premiers cycles universitaires est prohibée », ajoute le syndicat.
Parmi les mises en cause figurent les universités de Savoie (pour ses licences de physique-chimie), Bordeaux 1 (mathématiques), Paris I et Paris X (droit franco-allemand), Bourgogne (Administration économique et sociale), Rouen, Marne-la-Vallée, etc.
Certaines universités s’abritent, selon l’Unef, derrière le fait que des formations spécialisées nécessitent des « pré-requis », par exemple en musique. Le syndicat rejette cet argument au motif qu’une formation de licence « est censée être adaptée au niveau baccalauréat ».

« Manque de moyens »

Cette pratique résulte du « manque de moyens » des établissements, dont 16 prévoient d’être en déficit à la fin de l’année, selon l’Union nationale des étudiants de France. Dans ce contexte, certaines « préfèrent réduire le nombre d’étudiants plutôt que d’affecter leurs moyens à l’embauche d’enseignants et au maintien de leurs capacités d’accueil », ajoute l’Unef. Elle a pour conséquence de pousser les étudiants « dans les bras du privé », estime le syndicat.

Selon son rapport, seuls 32,2% des bacheliers suivent des cours en faculté aujourd’hui contre 39,1% en 2005, alors que la progression des étudiants dans le privé a augmenté de 32% au cours de cette période.

Moins d’établissements épinglés pour frais d’inscription illégaux

Autre dérive dénoncée par l’Unef : 24 universités « persistent » à imposer des frais obligatoires en supplément des frais d’inscription, alors que les diplômes nationaux sont régis par des règles strictes. Mais cette fois, la tendance est plutôt à l’amélioration avec 24 établissements épinglés, contre 30 l’an dernier et plus 50 en 2005.
Quatre « sortent du lot »: l’Institut national polytechnique de Toulouse (INPT), où l’inscription au diplôme d’ingénieur s’élève à 9.000 euros contre un tarif réglementé de 606 euros, l’université de Grenoble 2 (800 euros de services « facultatifs » mutimédias), l’Agrocampus Ouest et Rennes 1 (750 euros en masters) et l’Université de Tours (150 euros en licence de droit franco-allemand). Pour les 20 autres, les frais sont de moins de cent euros (frais d’inscription, de dossiers ou de sports...).
L’an dernier, les établissements mis en cause dans le rapport de l’Unef s’étaient vigoureusement défendus en assurant respecter la loi.
L’Unef appelle le gouvernement à « contraindre les universités à respecter la loi » et à revoir le mode de financement des établissements.

 

 

mercredi 29 mai 2013

Tous diplômés d'Harvard, le fantasme des MOOC

 LE MONDE | 29.05.2013
Nathalie Brafman Journaliste au Monde

MOOC en anglais, CLOM en français. Deux "vilains" acronymes pour qualifier ces enseignements de masse ouverts en ligne, qui ont déjà séduit des millions de personnes dans le monde. La France n'est pas épargnée. Faire entrer l'université dans l'ère du numérique est même l'une des mesures du projet de loi sur l'enseignement supérieur et la recherche de la ministre Geneviève Fioraso, voté en première lecture, à l'Assemblée, mardi 28 mai. Un plan d'action est en cours avec, à la clé, un fonds spécifique. Dix questions pour tout savoir sur les MOOC.


Effet de mode ou vraie révolution ? D'un point de vue pédagogique, mettre à disposition des savoirs en ligne n'a rien de révolutionnaire. Le Massachusetts Institute of Technology (MIT) le fait depuis quinze ans et l'Open University au Royaume-Uni a vu le jour en 1969... "La différence est que toutes les conditions sont réunies, aujourd'hui, pour le développement de ce type de cours", affirme Stephan Bourcieu, directeur général de l'école de management ESC Dijon-Bourgogne. Au-delà du réseau, les supports de diffusion (tablettes, Web TV, smartphones) sont performants, et les nouvelles générations ont le nez sur leur ordinateur !
Pour qui ? Pourquoi ? Rendre accessible à tous le savoir, notamment dans les pays en voie de développement, c'est la grande philosophie des MOOC. Ils seraient aussi une solution à l'endettement des étudiants aux Etats-Unis. "On prétend servir tout le monde, or cela n'existe pas. Avoir 100 000 étudiants ne signifie rien puisqu'on ne les connaît pasAvant de penser aux contenus, il faudrait définir les publics et les ambitions pédagogiques", critique Dominique Boullier, sociologue, professeur à Sciences Po et spécialiste des usages du numérique et des technologies cognitives.
Les trois grands, indétrônables ? Les deux premières plates-formes ont été imaginées par des professeurs de Stanford (Californie). Udacity a vu le jour en février 2012, suivie, en avril, par Coursera. Cette dernière a levé 16 millions de dollars (12,4 millions d'euros) et propose 250 cours de grands noms d'universités et de professeurs, à plus de 3 millions d'inscrits.
A la même époque, le MIT et l'université Harvard (Massachusetts), vite rejoints par Berkeley (Californie), ont lancé edX. Aujourd'hui, difficile de lancer un MOOC sans être référencé sur l'une ou l'autre de ces plates-formes même si de plus petits acteurs se développent. "Demain, ce sera la compétence [contre] le prestige. Des professeurs compétents qui n'enseignent pas dans des établissements prestigieux pourront devenir de véritables stars de la Toile", prédit Matthieu Cisel, doctorant sur les MOOC à l'Ecole normale supérieure de Cachan (Val-de-Marne).
Des diplômes à la portée de tous ? Pour l'instant, la seule façon d'être diplômé d'une université, c'est d'être assis dans une salle d'examen et de plancher sur un sujet. Mais les plates-formes proposent des certificats reposant sur des quiz. Chez Coursera, une certification de base gratuite mais qui n'a aucune valeur est proposée, ainsi qu'un certificat biométrique (vendu entre 30 et 100 dollars selon les cours). Il permet d'identifier l'étudiant grâce à une photo biométrique et un deuxième filtre, le typing pattern, la manière dont on tape sur son clavier.
EdX et Udacity ont, elles, opté pour la certification en présentiel et signé avec Pearson Vue qui possède 4 000 centres d'examen dans 170 pays. Des expérimentations sont en cours pour mettre au point une correction aussi fine qu'un correcteur en chair et en os.
Sans certification, pas de MOOC ? La certification serait-elle la seule finalité du MOOC ? Pas si sûr. C'est comme à l'université, il y aura aussi des auditeurs libres. Ceux qui viennent juste pour apprendre. On constate déjà qu'entre les inscrits et ceux qui vont au bout, la perte est énorme. Mais pour M. Cisel, "nous sommes dans un changement de paradigme où les études ne vont plus servir forcément à obtenir un diplôme". Et pourquoi ne pourrait-on pas écrire sur son CV que l'on a obtenu une certification pour tel ou tel MOOC ? "On dit bien que l'on a gagné un concours de plaidoirie", lance Bruno Dondero, directeur du Centre audiovisuel d'études juridiques des universités de Paris, qui va lancer un MOOC de droit des entreprises à la rentrée.
Philanthropie contre profits ? A première vue, faire profiter à la terre entière des cours en ligne est plutôt louable. La réalité est un peu moins rose. Coursera n'accepte que les établissements prestigieux qu'elle connaît. Centrale Lille en a fait les frais : son MOOC lancé en avril a été retoqué. L'objectif de Coursera est commercial, elle prend la quasi-totalité des revenus de la vente de certificats biométriques et 80 % des profits. Elle veut vendre les bases de données des étudiants inscrits à ses cours à des chasseurs de têtes. EdX se place plus comme un détecteur de talents.
Les limites ? Quelque 200 000 étudiants ont suivi un cours d'archéologie chez Udacity... "Plus un cours en ligne est suivi, plus l'interactivité avec le professeur est réduite. Si c'est de la vulgarisation, tout le monde pourra suivre. Mais si le cours est très technique, la plupart abandonneront",insiste M. Bourcieu.
La France, en retard ? En France, les MOOC sont encore confidentiels mais de nombreux établissements y réfléchissent. Centrale Nantes et Télécom Bretagne ont été les premiers à lancer leur MOOC ; et Centrale Lille la première avec certificat. Près de 3 600 étudiants ont suivi le cours "ABC de la gestion de projet", 1 330 ont validé le certificat de base et 440 le certificat avancé. En septembre, Polytechnique, qui a rejoint la plate-forme Coursera proposera trois cours.
La fin des amphis ? C'est plutôt un nouveau mode d'apprentissage. Au lieu de venir en cours, d'écouter le professeur, les étudiants pourront travailler en amont. En cours, l'enseignant pourra répondre aux questions...
Grâce à ces universités en ligne, les professeurs devraient pouvoir libérer du temps pour leurs étudiants.
Le savoir aux mains de quelques géants ?
"Aujourd'hui, le cours sur l'histoire du monde depuis 1750 de Duke University [Caroline du Nord] enseigne à l'ensemble de la planète la Révolution française. C'est problématique", avoue M. Cisel. La France doit se positionner. "Sinon, on risque d'avoir quelques entités, qui auront la main sur la diffusion des savoirs au niveau mondial", s'inquiète Claude Kirchner, délégué général à l'Institut national de recherche en informatique et automatique.


MOOC: "Les étudiants qui travaillent leurs cours en ligne viennent mieux préparés aux sessions d'exercice"

LE MONDE | 29.05.2013
Benoît Floc'h Journaliste au Monde

Patrick aebischer, président de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPLF), en Suisse, analyse la révolution des cours ouverts en ligne et massifs, les MOOC (CLOM, pour l'acronyme français), en Europe. A compter de juillet, il mettra ses fonctions entre parenthèses pour réfléchir à cette révolution dans laquelle son établissement est bien engagé.


Quel enseignement à distance propose l'EPFL ? En 2012, l'Ecole lançait son premier cours en ligne sur la plate-forme américaine Coursera. Depuis, nous avons signé avec la plate-forme EdX d'Harvard et du Massachusetts Institute of Technology. Nous ne voulons pas être dépendants d'une plate-forme et gardons la propriété intellectuelle de nos cours. Notre premier cours, le MOOC de Martin Odersky, inventeur du langage informatique Scala, a attiré plus de 50 000 étudiants, dont plus de 10 000 ont passé les examens finaux ! Depuis, quatre cours ont été mis en place et une dizaine d'autres sont en préparation, notamment pour des cours de science de base. Nous venons de lancer notre Centre pour l'éducation à l'ère digitale et de créer une MOOCS Factory, laboratoire dans lequel nos professeurs peuvent trouver l'encadrement technique et pédagogique pour produire les cours par petites sessions de 5 à 10 minutes, mises en scène devant une caméra. Un travail d'artisan qui demande à l'enseignant l'équivalent en préparation de trois à quatre fois la durée du cours.
Quels changements cela a-t-il déjà produit ? On a encore peu de recul, mais je suis fasciné par l'engouement de nos professeurs. Certains n'ont quasiment pas dormi pendant six mois pour préparer leur MOOC !
A terme, il ne s'agit évidemment pas de transformer nos 1 500 cours en virtuels, mais seulement certains, notamment ceux de première année.
Que pensez-vous de cette révolution ? C'est une révolution qui aura des répercussions multiples très positives pour nos institutions. L'Europe a parfois de bonnes raisons de faire preuve de recul critique, mais, dans ce domaine, je pense qu'elle doit être beaucoup plus motrice.
L'avènement des MOOC n'est pas une révolution pédagogique en tant que telle, c'est une révolution infrastructurelle, rendue possible par la rapidité des réseaux et la maturité des pratiques d'interactions. Elle initiera indirectement des changements pédagogiques. Petit exemple concret : certains de nos enseignants nous ont rapporté que les étudiants suivant la partie théorique de leur cours sur le Web viennent mieux préparés aux sessions d'exercice. Est-ce parce qu'ils peuvent lire et relire plusieurs fois les modules filmés, chose que l'on peut difficilement faire dans un cours ex cathedra ? Est-ce parce qu'ils le font en petits groupes et peuvent interagir entre eux plus directement ? L'avenir le dira.
Les MOOC préfigurent-ils l'université du futur ? J'ai le sentiment que cela ne va pas totalement bousculer le paysage académique actuel. En revanche, je suis persuadé que cela va modifier la notion même des cursus et nous ouvrir à de nouveaux publics. Les résultats du premier MOOC, donnés par un professeur de Stanford, ont montré que les meilleurs scores n'étaient pas réalisés par des étudiants de Stanford [Californie]. En l'occurrence, c'est une jeune femme mariée avec des enfants qui a fait le meilleur score. Or, elle n'avait jamais fait d'études universitaires.
Cette nouvelle offre permet de suivre des cours le soir, le week-end, et de construire son système de connaissance à sa vitesse et selon ses besoins. Les MOOC représentent également un formidable nouvel instrument pour la formation continue.
Quels nouveaux publics cela permet-il de toucher ? La crise de l'enseignement supérieur a touché très fortement les Etats-Unis. Les Américains finissent leurs études avec des dettes incroyables. Sur Coursera, seul le certificat de fin de cours coûte environ 40 dollars (31 euros). J'ai évoqué précédemment les exclus sociaux, mais la palette des intérêts et des publics est évidemment infinie : compléments de cours pour nos étudiants, formation continue postuniversitaire, compléments de connaissance pour des curieux. Le monde des seniors est évidemment un public tout naturel.
Je m'intéresse à l'Afrique, et je vais passer une partie de mon congé sabbatique de fin d'année à évaluer sur place les potentiels des MOOC pour l'enseignement supérieur. Avec notre réseau d'excellence des sciences de l'ingénieur et de la francophonie, dont la France est partenaire, nous prévoyons de développer des contenus en français et des supports adaptés aux besoins de certains pays africains, que ce soit en sciences de base ou en ingénierie. Sur le plan des infrastructures, l'accès a tendance à se disséminer ; Google a même mandaté le fournisseur international de service par satellite O3b Networks pour couvrir l'Afrique en satellites d'accès à Internet. Ces défis me motivent.

samedi 25 mai 2013

A propos de la Khan Academy




References

La Khan Academy : une éducation vraiment réinventée ? Mathieu Oui | Publié le 28.08.2013

mercredi 22 mai 2013

Les dix principales mesures de la Cour des comptes pour une meilleure gestion des enseignants

  Le Monde.fr |

Dans son rapport Gérer les enseignants autrement, rendu public mercredi 22 mai, la Cour des comptes propose 19 mesures. Mise en perspective des dix principales.
  • Redéfinir les missions des enseignants
Depuis 1950, le métier est défini par un nombre d'heures devant les élèves. Des rendez-vous avec les parents aux conseils de classe en passant par le suivi des élèves, ou le soutien, leurs taches se sont multipliées au fil des ans sans qu'elles soient explicitement définies. La Cour souhaiterait qu'un cadre national soit établi incluant toutes les missions de l'enseignant en 2013.
  • Annualiser les heures de travail
Un professeur des écoles doit travailler 972 heures par an, 864 devant les élèves et 108 sous d'autres formes. Seul les enseignants du primaires ont une définition annualisée de leur tâche. En revanche, un agrégé est astreint à 15 heures de cours par semaine et un certifié à 18 heures. Si les élèves sont absents pour cause d'examen, de stage ou de voyage scolaire, ces cours sont aujourd'hui perdus. L'annualisation permet en outre d'optimiser le système de remplacement.
  • Une gestion locale
Directeurs d'école et chefs d'établissement doivent pouvoir moduler la répartition des obligations de service des enseignants en fonction des postes occupés et des besoins des élèves, sous la supervision des directeurs départementaux et des recteurs, et avec l'équipe pédagogique.
  • Bivalence ou polyvalence
Dans l'enseignement général, hors l'histoire-géographie, la bivalence est pourfendue comme un risque de baisse de niveau des enseignants. En lycée professionnel cela existe depuis des années.
  • Echanges entre enseignants
Un maître du primaire qui va en collège, où l'on a besoin de lui, et un professeur de collège qui vient un peu en école.... Dans la droite ligne de ses rapports précédents, la Cour des comptes propose de penser la scolarité obligatoire de 6 à 15 ans comme un bloc. Les échanges entre premier et second degré visent à atténuer la rupture du passage en collège.
  • Attirer en zone difficile
Un service d'enseignant dans un collège très défavorisé prendrait en compte toutes les missions à assurer et pourrait de ce fait intégrer moins de cours et plus de temps de concertation. L'idée est de rendre attractifs les établissements aujourd'hui boudés.
  • Concours académiques à bases d'épreuves nationales pour les concours à gros effectifs
Afin de casser le principe répulsif qui veut qu'un jeune enseignant fasse ses classes à Créteil, Versailles, Amiens ou Lille, le recrutement serait académique pour les enseignants du second degré comme c'est déjà le cas pour les professeurs des écoles.
  • Profilage des postes
Aujourd'hui 6,1 % des enseignants sont affectés en fonction de leur profil. "Cette adaptation du service au poste est aujourd'hui réservée à des filières sélectives alors qu'elle n'est pas utilisée ailleurs. D'autres pays appliquent ce principe de façon générale", précise le rapport. Les modèles qu'elle a suivis sont les Pays-Bas, le land de Berlin et l'Ontario au Canada. Cela implique évidemment une gestion de proximité des carrières.
  • Connaître les besoins des élèves
Ce système implique une évaluation afin de "doter les établissements en postes d'enseignants sur la base d'un forfait par élève modulé en fonction des besoins des élèves". Cela peut aller du simple à plus du double comme au Canada ou aux Pays-Bas, deux pays dont la Cour s'est servi comme modèles.
  • Un salaire mieux différencié
Aujourd'hui, la vraie différence se fait sur la feuille de paye entre celui qui assure des heures supplémentaires et celui à qui on n'en propose pas. La Cour propose de différencier davantage les rémunérations en fonction de l'implication. Une manne financière serait octroyée à l'équipe éducative qui la gérerait étant au plus près du terrain. Les évaluations pourraient aussi être menées globalement sur l'équipe et non plus enseignant par enseignant.

La Cour des comptes veut refonder la gestion des profs

Le Monde, 22 mai 2013

La Cour des comptes propose sa refondation de l'école. Soucieux d'optimiser les 17 % du budget de l'Etat qui servent à la rémunérer les enseignants, les magistrats de la rue Cambon publient une proposition de réforme en 146 pages et 19 propositions.

Ce rapport thématique, intitulé Gérer autrement les enseignants, rendu public mercredi 22 mai, préconise d'en finir avec la gestion nationale des 837 000 "profs", une gestion effectuée comme s'ils avaient tous les mêmes compétences et les mêmes envies et comme si les élèves se ressemblaient dans tous les établissements. Le rapport vise une meilleure adaptation aux besoins réels des élèves et une véritable gestion des carrières.

La Cour propose que le métier, défini aujourd'hui par un nombre d'heures de cours à assurer chaque semaine, soit désormais pensé comme un nombre d'heures et des missions à effectuer sur l'année, et que la répartition de ces heures entre les cours et la réponse aux autres besoins du terrain soit décidée au sein des établissements.

La coordination d'une discipline ou d'un niveau d'enseignement, l'aide aux élèves seraient pris en compte dans des services enseignants. Plus une école, un collège ou un lycée accueilleraient d'élèves en difficulté, plus ils bénéficieraient d'un nombre élevé d'enseignants. La province de l'Ontario, le land de Berlin ou les Pays-Bas qui ont servi de modèle à la Cour osent dépenser deux fois plus pour leurs élèves en difficulté. Aujourd'hui, les collèges les plus durs n'attirent pas les enseignants puisqu'on y enseigne autant qu'ailleurs et qu'il faut en plus y gérer les problèmes sociaux. Pour rendre ces zones attractives, la Cour parie sur un vrai allégement du nombre de cours qu'un professeur devrait y assurer par rapport à un établissement du centre-ville.

Dans ce schéma, les enseignants de collège pourraient délivrer plusieurs disciplines et faire des échanges de services avec les maîtres de l'école d'à côté en cas de besoins des élèves. Un point que le ministre Vincent Peillon avait inscrit dans sa loi d'orientation, mais sur lequel il a reculé en novembre, face à l'opposition du principal syndicat du secondaire, le SNES-FSU.

Et plutôt que passer un concours national, et se voir affecté à l'autre bout du pays dans les établissements boudés par les professionnels chevronnés, comme c'est le cas pour plus de six nouveaux profs sur dix, l'enseignant du secondaire choisirait une académie et y passerait les épreuves nationales du concours, comme c'est la règle pour le primaire.

La Cour aborde aussi le problème de la rémunération et postule qu'on peut mieux payer les professeurs en répartissant différemment les 49,9 milliards d'euros de leur masse salariale. Elle s'insurge que des agrégés continuent à être nommés en collège, où ils sont payés 30 % de plus qu'un certifié (titulaires du capes) pour travailler 15 % de moins.

Plus globalement, elle estime que l'argent devrait aller vers ceux qui choisissent la difficulté. Sans parler de salaire au mérite, la Cour des comptes préconise que l'"engagement" soit mieux reconnu, que les équipes pédagogiques disposent d'une manne pour l'établissement et s'autoévaluent. Ce système, inspiré du modèle finlandais, permettrait des économies et éviterait d'attendre un inspecteur qui ne passe qu'une fois tous les quinze ans pour qui enseigne le sport à Versailles, une fois tous les dix ans lorsqu'on est en sciences économiques à Limoges...

Pour construire ce schéma, la Cour des comptes est partie de plusieurs constats. D'abord l'inefficacité croissante de l'école française qui plonge dans les évaluations internationales des élèves depuis l'an 2000 et oublie sur le bord du chemin ses élèves les plus faibles. Ensuite, la crise du recrutement des enseignants, qui montre que quelque chose ne tourne pas rond quand le chômage sévit. Entre 2006 et 2012, on est tombé de 6 candidats pour un poste mis au concours à 2,7. Même si les créations de postes de la gauche ont conduit à une remontée des candidatures, la défiance reste de mise.

La balle est dans le camp du ministre, qui a désormais sur son bureau une proposition de refondation plus radicale que la sienne. Sa réponse, annexée au rapport, laisse peu d'espoir qu'il ouvre ce dossier propre à indisposer le syndicat majoritaire du second degré sur à peu près tous les points abordés.

Comme on le souligne dans l'entourage du ministre, "il manque à ce rapport un chapitre dans lequel la Cour des Comptes nous explique comment faire"... La rue Cambon, elle, continue au fil de ses rapports à dessiner une école qui offrirait ce qu'elle estime être un meilleur service à la nation pour 6,3 % du PIB. Et, surtout, une école plus égalitaire.

Les meilleurs enseignants ne sont pas mieux payés que les autres

  Le Figaro, 22 mai 2013 

En 40 ans de carrière, un enseignant très bien noté ne perçoit que 16,4 % de plus que celui qui progresse uniquement «à l'ancienneté».

«Les écarts de rémunération sont faibles et au détriment des meilleurs enseignants», dénonce la Cour des comptes dans son rapport «Gérer les enseignants autrement». En cumul sur 40 ans de carrière, un enseignant qui progresserait toujours «au grand choix» - c'est à dire grâce à la bonne notation de ses supérieurs - percevrait 16,4 % de plus que celui qui progresserait uniquement «à l'ancienneté».

Mais de toute façon, en pratique, «cette différence est moindre et peu ressentie par les intéressés», observe la Cour. Car les cas théoriques extrêmes se rencontrent rarement. L'ancienneté compte fortement pour accéder aux échelons maximum de la grille (la hors classe). De fait, au bout de 10 ans de carrière, l'écart maximum de rémunération n'est que de 6 %.

Les comparaisons internationales fournies par l'OCDE font apparaître que la rémunération des enseignants est inférieure de 30 % à la moyenne européenne dans le primaire et de 10 % au collège. Le caractère peu attractif de la rémunération en France n'est pas la conséquence d'un temps de travail plus faible. Le niveau de la rémunération est le fruit d'une évolution de long terme. C'est en réalité le nombre d'enseignants qui rend le ministère réticent à mettre en œuvre des mesures de politique salariale. Depuis de nombreuses années, le choix implicite a ainsi été de privilégier le nombre d'enseignants sur le montant de leurs rémunérations…

Dans le contexte actuel de redressement des comptes publics, la Cour a déjà eu l'occasion d'affirmer que seule une politique de réduction des effectifs était à même de fournir des marges de manœuvre salariales. Cette politique éducative qui était affichée dans le programme présidentiel de Nicolas Sarkozy est l'inverse de celle prônée par François Hollande…

Les agrégés en ligne de mire

La Cour s'attaque directement aux professeurs agrégés de l'enseignement secondaire qui doivent quinze heures de cours hebdomadaire -contre dix-huit pour les titulaires d'un Capes- et sont pourtant mieux payés. Il est inéquitable que des enseignants exerçant dans le même établissement, au même niveau scolaire et dans la même discipline aient un nombre d'heures de cours inférieur à d'autres au seul motif de leur corps de recrutement. Seules la nature des postes et les conditions locales d'exercice des fonctions devraient être prises en considération pour pouvoir moduler à la baisse le nombre d'heures de cours au sein du temps de service, estime-t-on à la Cour des Comptes.

S'agissant du déroulement de leur carrière, les enseignants n'ont pas de véritable perspective de carrière autre que géographique. Seule l'agrégation apparaît leur permet de progresser alors qu'elle ne conduit pas à un changement de responsabilité. La différenciation des postes, notamment dans la coordination des équipes pédagogiques et l'appui aux enseignants, sont mises en œuvre en Allemagne, au Canada et aux Pays-Bas. Elles permettraient d'offrir aux enseignants des perspectives de carrière plus attractives et apporteraient une meilleure réponse à la diversité des situations d'enseignement, selon la Cour.

Cette dernière met notamment en avant l'exemple de la province de l'Ontario, au Canada, dont les résultats scolaires des élèves de quinze ans sont meilleurs que les nôtres. Dans cette province, l'évaluation des résultats fonde l'ensemble des politiques scolaires: les dotations budgétaires varient de un à trois selon les besoins des élèves. Les obligations de service incluent quatre heures par semaine pour le travail en équipe, l'appui entre enseignants et la formation. Enfin, les nouveaux enseignants titulaires bénéficient d'un programme d'appui (tutorat, évaluation renforcée).

Éducation nationale : la charge de la Cour des comptes

  Le Figaro, 22 mai 2013 

De l'embauche des professeurs à leur gestion par l'État, en passant par la politique de rémunération du ministère de l'Éducation nationale, les Sages de la rue Cambon dévoilent toutes les faiblesses du « Mammouth ».

«Gérer les enseignants autrement.» Dans son rapport thématique dévoilé mercredi matin, la Cour des comptes brocarde le gouvernement actuel.

Selon les vénérables de la rue Cambon dirigés par le socialiste Didier Migaud, l'Éducation nationale «ne souffre pas d'un manque de moyens ou d'un nombre trop faible d'enseignants, mais d'une utilisation défaillante des moyens existants». Et ce, alors même que le gouvernement a décidé d'embaucher 60.000 enseignants d'ici la fin du quinquennat!

Elle estime ainsi que «l'évolution du nombre d'enseignants est déconnectée de celle des élèves». Les effectifs des enseignants du secondaire n'ont ainsi pas cessé d'augmenter entre 1993 et 2005 alors que celui des élèves diminuaient parallèlement.

Entre 2009 et 2011, les effectifs d'enseignants du primaire augmentaient quand ceux de leurs élèves stagnaient… Chaque année, c'est le volume d'heures de cours et le souci d'assurer chaque année un débouché satisfaisant aux universités pour les concours qui guident les décisions de recrutement, se désolent les Sages qui ont enquêté au sujet de la gestion des enseignants dans cinq académies: Bordeaux, Lille, Limoges, Nantes et Versailles.

Les résultats du système éducatif français sont particulièrement inégalitaires

En dépit de ce surcroît d'enseignants par rapport aux élèves, les résultats du système éducatif français sont particulièrement inégalitaires et les résultats des enfants se dégradent lentement. La part des élèves les plus faibles s'est ainsi accrue de 26 % en lecture et de 37 % en mathématiques entre 2000 et 2009.

Le système français est un de ceux où le poids des origines socio-économiques des élèves pèse le plus sur les résultats scolaires. L'écart de résultats entre les meilleurs élèves et les plus faibles est l'un des plus élevés de l'OCDE. Pour la Cour, il existe surtout un écart entre la réalité du métier enseignants et leurs statuts.

Leur «temps de service» n'est centré que sur les seules heures de cours alors que la loi leur assigne d'autres missions: relations aux parents, travail en équipe, aide au travail personnel des élèves, formation, conseil et orientation…

Le temps qui y est consacré par les enseignants n'est que très imparfaitement mesuré, et rémunéré que partiellement, à travers un système de décharges et d'heures supplémentaires attribuées par quota aux différents établissements. Une telle organisation conduit à ne pas valoriser l'implication des enseignants dans toutes ces activités pourtant essentielles pour la réussite scolaire de tous les élèves…

La Cour recommande donc d'élargir leurs obligations de service à l'ensemble des activités effectuées dans l'établissement au service des élèves, sous la forme d'un forfait annuel, la répartition de ce temps de service devant pouvoir être modulée en fonction du type de poste occupé et des besoins locaux des élèves.

Une «affectation inadaptée» aux besoins des élèves

L'affectation des enseignants est également un «système inadapté aux besoins des élèves et aux exigences des postes». Le système ne tient pas compte des profils des enseignants. En 2011, 65 % des débutants du second degré ont été affectés en établissement difficile ou comme remplaçants, contre 33 % pour le reste des enseignants.

Le système favorise l'instabilité des enseignants débutants et encourage peu la mobilité des enseignants expérimentés. À 30 ans d'ancienneté, un enseignant est présent en moyenne depuis 20 ans dans son établissement.

Le système d'affectation automatique «au barème» en fonction de différents critères (ancienneté de poste et de service, rapprochement de conjoint, handicap, situation familiale, etc.) a été jugé illégal par le Conseil d'État à plusieurs reprises. Tous les postes sont considérés comme équivalents et tous les enseignants sont jugés également qualifiés pour les occuper. Ni le directeur de l'école, ni le chef d'établissement n'ont leur mot à dire.

Le caractère automatique de ce système répond au souci d'objectivité parfaite, du moins en apparence, auquel les organisations syndicales sont attachées. Mais il conduit à de nombreux dysfonctionnements dans la répartition des professeurs.

Plus généralement, la Cour recommande de fonder le système des mutations sur une meilleure adéquation entre les exigences du poste et le profil des enseignants appelés à l'occuper, sur la base d'entretiens entre les candidats et les chefs d'établissement, en s'inspirant d'exemples étrangers et du système existant dans les établissements d'enseignement privé catholique.

Les chefs d'établissement joueraient un rôle plus affirmé dans la constitution et l'animation des équipes pédagogiques, et pourraient moduler la répartition du temps de service des enseignants en fonction des besoins locaux, dans le cadre d'une contractualisation avec les rectorats et les services départementaux de l'Éducation nationale.





Le pouvoir des présidents d’université remis en cause

 Le Figaro, 22 mai 2013

Le projet de loi Fioraso pourrait aboutir à la mise en place d’un contre-pouvoir paralysant la prise de décisions.

Un président d’université tout puissant, gérant son budget ainsi que ses ressources humaines, et un manque criant de collégialité… Autant de reproches faits par l’opposition de l’époque à la loi LRU sur l’autonomie des universités, portée en 2007 par Valérie Pécresse et généralisée à l’ensemble des universités depuis 2012.
Aussi, le contre-projet à cette réforme phare de la présidence Sarkozy était-il largement attendu à gauche, de l’Unef au Syndicat national de l’enseignement supérieur (Snesup).

En juin 2012, la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur, Geneviève Fioraso ,promettait une remise à plat de la LRU. «Il faut réintroduire la collégialité. C’est l’esprit même de l’université. Le président manager, ça ne marche pas», expliquait-elle.

Quid du contenu de son projet, dont l’examen débute ce mercredi à l’Assemblée? «Il se situe dans la lignée de la LRU», assène Marc Neveu, cosecrétaire général du Snesup, largement déçu. Au bout du compte, un texte entre deux eaux qui, sans remettre en cause la marche inéluctable vers l’autonomie des universités françaises, introduit une collégialité de façade risquant d’aboutir à des situations de blocage…

Concrètement, il propose d’instaurer, parallèlement au conseil d’administration, un «conseil académique» regroupant les commissions formation et recherche, doté d’attributions en matière de recrutement et de suivi de carrière des enseignants-chercheurs. Objectif affiché par la ministre: «Rendre la gouvernance des universités plus démocratique».

Mais de tous côtés, la mesure suscite peu d’enthousiasme. Derrière ce conseil académique, certains perçoivent le spectre d’un contre-pouvoir. Et ce d’autant plus que le président du nouvel organe pourrait être une autre personne que le président d’université…

 «La mise en place d’une potentielle direction bicéphale de l’université est un risque majeur», estime Gérard Blanchard, vice-président de la Conférence des présidents d’université. La CPU soutient le projet de loi Fioraso avec la même «réserve» qu’elle avait soutenu la loi LRU. «Les conditions d’un blocage sont créées», regrette Jean-François Balaudé, président de Nanterre, qui s’interroge sur la capacité d’un président à jouer son rôle de «coordonnateur et stratège» dans de telles conditions.

Dans le même temps, les partisans d’une collégialité accrue sont déçus. Car dans la lignée de la loi précédente, le conseil d’administration reste largement dominé par les enseignants-chercheurs (30 à 50 %) et les personnalités extérieures (25 à 30 %), les étudiants et administratifs demeurant minoritaires.

Fioraso: «J’assume!»

Changement majeur et hautement symbolique: les «personnalités extérieures» vont désormais participer à l’élection du président. «Certains diront: “Pécresse n’a pas osé le faire, Fioraso le fait.” J’assume!», explique la ministre.

Un nouveau vent va-t-il souffler dans les universités? Tous reconnaissent que le profil du président va s’en trouver modifié. «Le président doit rester un universitaire, élu par ses pairs», souligne le président de Nanterre, quand d’autres redoutent une forte ingérence de la région.

Au nombre de huit, ces personnalités comprennent les «incontournables», représentants de la région, du monde patronal et syndical, auxquelles s’ajoutent deux autres personnalités, issues notamment du monde socio-économique.

De la région justement, il est fortement question dans ce projet de loi, avec des conséquences difficiles à mesurer pour l’heure sur la gouvernance. Il prévoit la mise en place d’une trentaine de «communautés d’universités», avec lesquelles le ministère établira un contrat de site.

«Une mesure symbolique du rôle de stratège et régulateur que souhaite jouer le ministère, garant de l’émergence et de la cohérence de pôles complets, harmonisés et adaptés aux réalités de chaque territoire», explique le ministère.

«Le passage de 100 sites actuellement à 30 n’est pas anodin», estime pour sa part la CPU évoquant un «transfert de prérogatives» - ces nouveaux ensembles seront dotés d’un conseil d’administration et d’un président.

La CPU regrette par ailleurs le caractère «obligatoire» d’une telle mesure alors même que des exemples récents, à Strasbourg, Aix-Marseille et en Lorraine, prouvent que de tels regroupements se sont opérés spontanément.

Président de l’université de Nantes, Olivier Laboux ne perçoit pas ces communautés d’un mauvais œil. «Pour exister sur le plan européen, j’ai tout intérêt à travailler sur un site Grand Ouest», explique-t-il en appelant à une utilisation pertinente de l’autonomie. «Il nous revient de dessiner notre territoire.»

Cette perspective régionale, dans laquelle s’inscrit la loi Fioraso, est un sujet de préoccupation majeure pour le Snesup, qui craint «la fin du cadrage national et l’accroissement des inégalités territoriales».

Reste que le modèle de gouvernance dominant dans le monde anglo-saxon, mais aussi en Europe, de l’Allemagne à l’Espagne, tend bien à une autonomie allant de pair avec la décentralisation. Le ministère a d’ailleurs largement recours à l’expression «universités fédérales».