jeudi 29 novembre 2007

Universités : la mauvaise colère

Universités : la mauvaise colère , par jacques Julliard, nouvelobs.com, 29 novembre 2007

Des actions minoritaires n'aident pas à la mobilisation des étudiants autour d'une ligne revendicative cohérente

Tous ceux qui sont attachés à l'université française, aux valeurs qu'elle défend, à commencer par l'esprit critique; tous ceux qui savent que le développement de l'enseignement supérieur et de la recherche est la condition de l'essor économique du pays, de la création d'emplois et de la défense du niveau de vie; tous ceux, enfin, qui pensent que le syndicalisme a besoin de la démocratie pour vivre, tous ceux-là sont consternés par la tournure que prend aujourd'hui le mouvement de contestation étudiante. Et cela qu'ils soient de droite ou, surtout, de gauche. J'ai critiqué assez tôt les orientations économiques et sociales du gouvernement Sarkozy pour avoir le droit de dire, sans encourir le soupçon de complaisance, que la loi sur l'autonomie de l'université est une loi nécessaire.

C'est d'abord un mouvement très minoritaire. Non seulement parce qu'il ne touche pas les secteurs soumis à sélection (grandes écoles et prépas, IUT, BTS), mais aussi parce qu'à l'intérieur des universités proprement dites il ne s'est guère développé que dans le secteur des lettres et sciences sociales. De ce fait, il est condamné à la violence. Le blocage est un aveu de faiblesse et une violence faite au droit des étudiants de se prononcer librement. Le reste est du même acabit : manipulation des assemblées générales et des votes, atmosphère d'intimidation, rumeurs mensongères, insultes, brutalités. L'Unef, qui joue dans cette affaire le rôle responsable qui a été celui de la CGT chez les cheminots, s'en est plainte elle-même. Quand F extrême-droite utilise ponctuellement de telles méthodes, comme à Assas, on s'en scandalise et l'on crie au fascisme. Faut-il les tolérer ici de la part de SUD, de la CNT, des autonomes ?

Il y a plus grave encore : le mouvement actuel a quelque chose d'immobiliste qui s'oppose à toute espèce de réforme. En l'absence de révolution, les révolutionnaires sont en vérité les meilleurs auxiliaires des conservateurs. C'est dire qu'en dépit de son discours populiste, le mouvement s'accommode d'un taux d'échec insupportable dans les premiers cycles, d'inégalités sociales énormes et du déclin de l'institution elle-même. Un tel mouvement, malgré ses dehors juvéniles, a quelque chose de mortifère. Il est l'équivalent chez les étudiants de ce que furent Pierre Poujade et Gérard Nicoud chez les artisans et commerçants : activisme désordonné, vision crépusculaire, absence de perspectives.

Pourquoi, dès lors, rencontre-t-il un écho dans la masse étudiante, lors même qu'elle en condamne les méthodes ? D'abord à cause d'une véritable paupérisation de la condition étudiante, visible notamment dans le logement. La difficulté de se loger et le prix des locations, le délabrement des cités universitaires, tout cela pèse aujourd'hui très lourd. Ensuite, à cause de la morne désespérance de la plupart des étudiants quant à leur avenir. C'est la crainte du chômage possible, plus que le chômage effectif lui-même, qui ronge le for intérieur de la nation. D'où le caractère contradictoire des doléances. Les étudiants déplorent que les universités soient devenues des usines à chômeurs, mais en même temps ils redoutent que les entreprises puissent mettre la main sur l'université. En vérité, derrière un discours anticapitaliste convenu se cache un déni de l'économique, l'aspiration à un monde immobile, un rêve de lévitation sociale permanente, sous la protection de l'Etat.


Certes, il ne s'agit pas de confondre un mouvement minoritaire avec une masse étudiante beaucoup plus consciente des réalités. Mais il faut, à la fin, savoir ce que l'on veut, sinon on ne l'aura sûrement pas. C'est ainsi - autre contradiction - que le mouvement étudiant est hostile à la sélection à l'entrée des universités et il a raison : nous n'avons pas trop d'étudiants, au contraire. Mais en même temps il dit non à toute orientation, à toute diversification des filières, à toute spécialisation des universités : les mêmes diplômes pour tous et pour toujours ! On ne peut tout de même pas, sous prétexte d'égalité, promettre le Collège de France ou l'Académie des Sciences à toute une classe d'âge. Victime de la rotation rapide de ses cadres et d'une véritable anomie du milieu, le monde étudiant peine à définir une identité. Il a besoin de se réunifier autour d'une ligne revendicative cohérente, pour cesser d'être la proie de ses politiciens et de ses convulsionnaires.

Jacques Julliard
Le Nouvel Observateur

jeudi 15 novembre 2007

Un zapping diffusé sur lemonde.fr

Le zapping du lemonde.fr du 15 novembre 2007

A Nanterre le 15 novembre 2007

A Nanterre le 15 novembre 2007