Le Monde, 20 mai 2010
Elles font rarement parler d'elles, si ce n'est, généralement, en bien. Les sections de technicien supérieur (STS), ces filières qui mènent au brevet de technicien supérieur (BTS), vont faire l'objet d'une modernisation à partir de la rentrée prochaine, a annoncé jeudi 20 mai 2010 Valérie Pécresse, la ministre de l'enseignement supérieur, lors de la remise du rapport du recteur Jean Sarrazin sur les formations technologiques courtes.
Jusqu'à présent, les BTS n'ont pourtant pas démérité, comme le souligne le rapport Sarrazin. Avec 20 % d'enfants d'ouvrier, les STS, qui accueillent cette année 234 000 étudiants, jouent un rôle-clef dans la démocratisation de l'enseignement supérieur. De même, l'écrasante majorité des titulaires d'un BTS s'insèrent rapidement sur le marché du travail. Les trois quarts, qui plus est, trouvent un emploi à durée indéterminée. Dans ces conditions, pourquoi moderniser, au risque de le désorganiser, ce dispositif performant ?
Pour "favoriser la réussite de tous les étudiants" dans cette filière, assure la ministre.
"La réussite des étudiants reste encore très inégale selon leur voie d'origine", relève-t-elle : huit bacheliers généraux sur dix et sept bacheliers technologiques sur dix obtiennent leur BTS, quand seul un bachelier professionnel sur deux décroche ce diplôme. De plus, après la réforme de la voie professionnelle du lycée, réduisant de quatre à trois ans la longueur du cursus, le nombre de titulaires d'un bac pro devrait augmenter en BTS.
Enfin, dans un souci de rapprochement avec l'université, la ministre souhaite améliorer les coopérations et les passerelles entre les sections de technicien supérieur (STS), les instituts universitaires technologiques (IUT) et les universités.
DIX MESURES DE RÉNOVATION
Pour réformer, la ministre avance une dizaine de mesures à soumettre à la concertation, avec notamment les organisations syndicales.
La plus spectaculaire devrait être l'adaptation de certains ingrédients du plan "réussite en licence" aux STS. Afin de mieux aider plus particulièrement les bacheliers professionnels, un accompagnement personnalisé est proposé.
"Cet accompagnement pourrait par exemple prendre la forme d'un premier semestre préparatoire, avec des enseignements méthodologiques et un suivi individualisé, comme cela se pratique désormais dans beaucoup d'universités", précise la ministre.
Et ce même si la petite taille des classes de STS est déjà l'un des facteurs de réussite de cette filière.
Autre mesure proposée, améliorer la poursuite d'études des étudiants de STS en favorisant des dispositifs réunissant STS, universités et écoles d'ingénieurs.
De même, la ministre souhaite la multiplication des passerelles avec les autres formations d'après-bac (IUT, licence) : "Notre objectif doit être de faciliter les réorientations d'étudiants de première année de licence vers les STS et les passerelles entre STS et IUT. Cela peut se faire grâce à la signature d'accords-cadres déclinés sous forme de convention entre les universités, leurs IUT et les lycées, qui accueillent les STS."
Pour ce faire, la ministre souhaite une réorganisation de la formation de STS en modules, "pour permettre la validation de blocs de compétences convertibles en crédits ECTS", déjà utilisé dans les universités.
Cela permettra non seulement d'uniformiser le système d'enseignement supérieur, mais également, assure la ministre, d'"individualiser les parcours", de "proposer aux étudiants de licence qui le souhaitent une réorientation en STS sans allongement de la durée d'études" (dix-huit mois au lieu de vingt-quatre mois) et d'"offrir aux étudiants un accès plus progressif aux qualifications".
Un étudiant quittant la STS avant l'examen final devrait à termes disposer d'un certain nombre de crédits ECTS, et pourra dès lors revenir finir son BTS quelques années plus tard. Et non repartir du début.
DES BTS ADAPTÉS AU MARCHÉ LOCAL
Pour s'inscrire dans le discours gouvernemental, Mme Pécresse souhaite doubler la part des étudiants de STS en apprentissage.
"Seuls 15 % des reçus au BTS en formation initiale empruntent cette voie. Je souhaite porter cette proportion à 30 % et pour y parvenir, je propose notamment de retenir un principe simple : la moitié au moins des nouvelles sections de BTS devront être en apprentissage."
Enfin, la ministre souhaite "rendre les formations de STS plus souples et plus réactives pour répondre aux nouveaux besoins de l'économie et de la société, en prévoyant dans chaque référentiel de formation une part de modules métiers spécialisés. Ces derniers viendraient compléter des enseignements communs définis par grands champs professionnels : les BTS pourraient ainsi s'adapter aux besoins de l'économie locale et aux évolutions du marché de l'emploi".
A partir de ces propositions, la ministre entend ouvrir une concertation cet été, avec la volonté d'une première application à la rentrée prochaine.
Philippe Jacqué