Le Figaro, 19 mai 2010
Les établissements français d'enseignement supérieur présenteront cet été leurs premiers projets dans le cadre du grand emprunt.
Grâce au projet d'excellence de l'enseignement supérieur allemand, né en 2005, l'université technique de Munich a réussi à faire revenir une dizaine de ses professeurs partis à l'étranger.
La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, aimerait que cette institution aux murs immaculés, forte de ses 24 400 étudiants, soit une source d'inspiration pour la quinzaine de présidents d'universités et de grandes écoles françaises qui l'accompagnaient ce mardi en Allemagne.
Ces derniers auront en effet bientôt à déposer leurs premiers projets dans le cadre du «grand emprunt» décidé par Nicolas Sarkozy et dont une large part sera accordée aux universités.
Un premier appel d'offres concerne les équipements d'excellence et les projets en santé pour 2,55 milliards d'euros. Il sera lancé cet été pour une sélection à l'automne. D'autres vagues de sélection suivront.
«Initiatives d'excellence»
L'Allemagne est décidément, pour Valérie Pécresse, le modèle à suivre. Elle affirme s'être «beaucoup inspirée de ce pays qui a pris de l'avance ces dernières années, surtout en matière d'innovation».
Cette inspiration a favorisé, en France, la création des pôles de compétitivité, l'agence nationale de la recherche, le plan campus et, plus récemment, les «initiatives d'excellence» du grand emprunt.
Également labellisé «initiative d'excellence» à l'issue d'un comité de sélection international en 2005, le campus de Garching, visité ce mardi, a partagé avec neuf autres universités allemandes près de 2 milliards d'euros.
Si ces dernières ont été primées, c'est principalement grâce à la visibilité internationale de leurs écoles doctorales et à leur projet de «clusters», ces structures qui englobent des laboratoires de recherche et des partenariats public-privé.
Elles ont aussi dû présenter des «concepts innovants». Pour Valérie Pécresse, ces trois critères «très intéressants» pourraient être retenus dans le cadre du grand emprunt.
«Main dans la main»
La directrice de l'École normale supérieure, Monique Canto-Sperber, a observé avec attention «le contact étroit entre la société et le monde universitaire».
«La recherche privée et la recherche publique fonctionnent la main dans la main. Ce n'est pas le cas en France», souligne-t-elle. Elle se réjouit surtout du fait que le système allemand ait permis de primer des institutions très diverses par la taille, telle la petite université de Constance et ses 7 000 étudiants.
«Il n'y a pas de conformisme intellectuel. L'idée de s'inspirer de l'excellence quelle que soit la forme qu'elle prend, c'est une bonne chose.»
Grâce à ces moyens supplémentaires à venir, Bernard Ramanantsoa, le directeur de HEC, espère quant à lui pouvoir attirer de grands chercheurs supplémentaires. Avec diverses institutions du plateau de recherche de Saclay, dans les Yvelines, il présentera un projet axé sur les «sciences de la décision».
Chercheurs de retour
Jean-Pierre Finance, le président de l'université de Nancy, souligne que la preuve du succès allemand réside dans les recettes financières supplémentaires accordées aux universités d'excellence.
«Ce système de sélection a permis de faire revenir des chercheurs allemands exilés. J'ai d'ailleurs perdu moi-même des professeurs d'informatique et de mathématiques repartis en Allemagne à cause de ce programme !»
Il compte bien s'inspirer de certaines des idées glanées lors de ce voyage d'études en Bavière, telle cette salle de garderie placée au cœur de l'université pour initier les enfants de maternelles aux sciences : «Ce n'est pas anecdotique, d'autant plus que nous cherchons par tous les moyens à attirer les jeunes vers les sciences.»
Les chiffres
- 11 milliards d'euros du grand emprunt sont consacrés à l'enseignement supérieur.
- 5 milliards d'euros sont prévus pour financer le plan campus destiné à rénover les universités. Ils proviennent de la vente par l'État des actions EDF.