mardi 16 avril 2013

L'accueil des étudiants étrangers, enjeu stratégique

  Le Monde, 16 avril 2013 

Décidément, il est grand temps que se termine l'examen du projet de loi sur le "mariage pour tous" ! Le changement du calendrier parlementaire pour permettre à l'Assemblée de procéder en urgence à une seconde lecture de cette réforme a fait, en effet, une victime collatérale : le débat sans vote, prévu mardi 16 avril, sur la politique d'accueil des étudiants étrangers en France a été reporté.

En dépit de ce contretemps, le gouvernement a décidé d'avancer sur un dossier essentiel pour l'attractivité universitaire de la France, au coeur des défis de la mondialisation.

Manuel Valls, ministre de l'intérieur, et Geneviève Fioraso, sa collègue de l'enseignement supérieur et de la recherche, ont annoncé plusieurs mesures pour améliorer l'accueil des étrangers non communautaires dans les universités et les grandes écoles de l'Hexagone.

Trois dispositions en particulier sont prévues. D'une part, le gouvernement propose d'accorder de plein droit – et non plus au cas par cas et au gré des préfectures – aux étudiants étrangers des visas de la durée de leurs études et de prolonger ces visas d'une année pour leur permettre de faire une première expérience professionnelle en France après l'obtention de leur diplôme.

D'autre part, les doctorants étrangers bénéficieront d'un visa permanent afin de mener leurs recherches dans des laboratoires français sans être suspendus à d'aléatoires renouvellements de titre de séjour.

Enfin, un guichet unique sera ouvert dans la plupart des campus, regroupant des représentants des préfectures et des services sociaux, pour faciliter l'accueil pratique de ces étudiants.

Ces mesures sont bienvenues. Elles referment, on l'espère définitivement, le chapitre de la politique déplorable menée par l'ancien ministre de l'intérieur, Claude Guéant.

Obsédé par le "risque migratoire", celui-ci avait pris, en mai 2011, une circulaire restreignant fortement les droits des étudiants étrangers.

Devant la levée de boucliers des présidents d'université, des directeurs de grande école et des chefs d'entreprise, mais aussi devant l'incompréhension des pays étrangers concernés, M. Guéant avait fini par amender son texte, sans toutefois y renoncer.

A peine installé, en mai 2012, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a abrogé cette circulaire, qui symbolisait le repli sur soi de la France.

Si elles ne règlent pas tous les problèmes – en particulier celui du coût de ces étudiants qui payent les mêmes droits d'inscription que les Français, contrairement à ce qui se passe souvent à l'étranger –, les nouvelles mesures annoncées confirment ce changement de cap. A juste titre.

Dans la compétition économique mondiale, chacun sait que le savoir est un enjeu stratégique.

L'enseignement supérieur doit attirer les meilleurs étudiants et les meilleurs chercheurs, qui seront, ensuite, les ambassadeurs de la France et renforceront sa politique d'influence, son "soft power".

Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie et l'Allemagne l'ont parfaitement compris.

La France, qui accueille quelque 230 000 étudiants étrangers non européens, a une tradition ancienne en ce domaine. Elle se doit, plus que jamais, de l'honorer.