Le Monde, 26 avril 2010
Le nombre de jeunes qui quittent le système éducatif sans un niveau de qualification reconnu a considérablement baissé en trente ans. Il a été divisé par quatre en trente ans, passant de 170 000 en 1975 à 42 000 en 2005 (hors outre-mer). Les sans-qualification représenteraient quand même encore 6 % des 700 000 jeunes qui composent une génération, selon la dernière statistique connue, publiée en 2008, par le ministère de l'éducation.
Sans qualification
Le terme "sans qualification" signifie une sortie du système sans être parvenu au minimum à une classe de niveau V, selon la nomenclature de la formation professionnelle. Ce niveau V correspond à l'année terminale de certificat d'aptitude professionnelle (CAP), de brevet d'études professionnelles (BEP), avec ou sans le diplôme.
Il peut aussi correspondre à une scolarité achevée en classe de seconde ou de première générale et technologique. Un jeune peut en effet ne pas avoir de diplôme mais être considéré comme qualifié s'il a, par exemple, fréquenté l'école jusqu'à la terminale et échoué au bac.
Sans diplôme
Si le nombre de 42 000 peut paraître "raisonnable", c'est au regard d'une autre statistique : celle des "sorties sans diplôme", un critère retenu en 2000 par l'Union européenne dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.
En 2005, ces sorties (sans diplôme du second cycle du secondaire ou sans diplôme professionnel) étaient au nombre de 120 000, soit cette fois 17 % d'une génération.
Certains diplômés du brevet des collèges en font partie, puisqu'il ne s'agit pas d'un diplôme de second cycle du secondaire.
Selon d'autres méthodes de classification, les "sans diplôme" sont tous ceux qui n'ont ni CAP ni BEP ni baccalauréat, soit 140 000 jeunes, environ 20 % d'une génération.
En fonction des critères retenus, les statistiques varient donc du simple au triple. Mais tous les jeunes concernés ne sont pas pour autant des "décrocheurs".
Décrocheur
Ce terme désigne en effet ceux qui partent avant la fin, à 16 ans, de l'obligation scolaire. La catégorie des "décrocheurs" est elle-même difficile à cerner. Certains élèves sont en rupture ou en conflit ouvert avec le système scolaire, d'autres décrochent en toute discrétion.
Le phénomène de décrochage, soulignait en 2005 un rapport des deux inspections générales de l'éducation nationale, "est particulièrement insidieux, parce que les sorties sans qualification se font au goutte-à-goutte : ce n'est jamais un phénomène massif ; il se compte par unité dans chaque établissement, à chaque niveau, dans une classe, et n'attire donc pas particulièrement l'attention".
Souhaitant un meilleur "repérage" des jeunes concernés, ce rapport concluait à la nécessité d'une approche "au niveau de l'établissement" et préconisait la création d'un "système de suivi informatisé des élèves".
Objectifs de Lisbonne
En matière de décrochage scolaire, la situation nationale n'est pas brillante. 11,8 % des 18-24 ans quittent en effet le système scolaire avant la fin de l'enseignement secondaire, plaçant ainsi la France en quinzième position sur vingt-sept. Ce classement est extrait d'un rapport de la Commission présenté le 26 novembre 2009 et officiellement adopté par le Conseil européen en février.
En mars 2000, l'Union européenne a défini comme objectif qu'au moins 85 % des jeunes âgés de 22 ans aient terminé leurs études secondaires en 2010 (ils sont 83 % en 2005), et que pas plus de 10 % des jeunes âgés de 18 à 24 ans aient quitté l'école avant d'avoir obtenu un diplôme d'études secondaires ou un diplôme professionnel ou un diplôme accordé dans le cadre d'une autre formation (17 % en 2005).
Luc Cédelle