Le Figaro, 14 janvier 2010
En septembre 2009, Valérie Pécresse a mis en place pour un an un Conseil pour le développement des humanités et des sciences sociales.
Que faire avec un doctorat d'archéologie ou d'ethno-psychologie ? Les filières de sciences humaines et sociales traînent cette image de «fabriques à chômeurs» qui formeraient des étudiants à des concours d'enseignement dont le taux de réussite tourne autour de 10 %.
Est-ce un hasard ? Elles étaient au cœur du mouvement universitaire du printemps 2009. Parce qu'elles incarnent à elles seules la crise identitaire d'une université massifiée, qui fonctionne toujours sur le modèle de la formation par les chercheurs de futurs chercheurs.
En septembre 2009, Valérie Pécresse mettait en place pour un an un Conseil pour le développement des humanités et des sciences sociales. Sous la présidence de Marie-Claude Maurel, directrice d'études à l'EHESS, il réunit quelques grandes figures des sciences humaines en France, d'Antoine Compagnon à Jean-Robert Pitte ou Alain Renaut, et quelques grands noms de l'entreprise ou de la presse, comme Franck Riboux ou Jacques Juillard.
Ce conseil rend jeudi un premier rapport d'étape dont les préconisations entendent répondre à cet enjeu crucial de l'insertion professionnelle des étudiants.
Développer des licences pluridisciplinaires
Forts du constat que 56 % des 1 300 000 étudiants des universités sont inscrits dans des filières relevant des sciences humaines ou sociales (de la linguistique aux sciences politiques et de l'histoire à la démographie), les sages observent dans leur rapport que l'organisation disciplinaire de ces filières correspond à une époque où celles-ci ne débouchaient que sur l'enseignement et la recherche.
Elles sont aujourd'hui le point d'atterrissage de nombre d'étudiants orientés par défaut, et dont bien peu passeront les concours.
Première préconisation : les membres du conseil proposent de rétablir l'année de propédeutique, c'est-à-dire de remise à niveau, supprimée en 1967, et de développer des licences pluridisciplinaires qui permettront aux étudiants de multiplier leurs connaissances pour aller vers «une éducation générale» «de type arts libéraux». Dans un monde où la capacité d'adaptation est une force, les sciences humaines, qui nécessitent une «maîtrise de la langue», doivent être valorisées.
Autre préconisation : «intensifier la formation à l'esprit de la recherche» en habituant les étudiants «à se constituer une information de première main», indispensable en ces temps de recours au «copier-coller» sur Internet.
Le rapport s'appuie également sur le développement, dans le cadre du plan licence, des stages en entreprises et de l'orientation, pour suggérer d'«inclure dans les licences généralistes et les masters recherche, des temps d'initiation au monde du travail».
Un encadré inséré dans le rapport évoque même, sur le ton de l'anecdote, un débat entre les membres du conseil issus de l'entreprise, sur l'art de l'exposé PowerPoint et la réhabilitation de la rhétorique. Mais le conseil s'interroge surtout sur le niveau des bacheliers qui accèdent à ces filières plus exigeantes qu'il n'y paraît.